Ph: DR

Publié le 12 septembre, 2022

Pas aisé d’être mère d’un enfant souffrant d’infirmité motrice et cérébrale en Afrique.  Moqueries, préjugés et stigmatisations sont le lot de souffrances morales que subissent au quotidien les mères et leurs enfants. Le couple mère-enfant se meurt à petit feu sous, pour la plupart, le regard indifférent de la société. 

Entre rejet, préjugé et stigmatisation…  

À Yopougon-Sideci, Madame Monique Akué fait partie de celles qui souffrent d’une telle situation. En 2010, elle accouche d’un petit garçon. Malheureusement pour elle, deux mois après, le nouveau-né tombe malade. Envoyé à l’hôpital, le pédiatre le diagnostic comme souffrant de l’Hydrocéphale. Selon la mère du garçonnet, son fils avait commencé à changer physiquement.  » La tête de mon enfant prenait une autre forme, elle n’arrêtait pas de grossir « , dit-elle, malheureuse. Cette déformation a fini par donner une nouvelle forme à son fils. Face à cette situation, raconte-t-elle, « Mon époux m’a abandonné ainsi que ses parents. Je fus accusée de tous les péchés d’Israël », déplore, éprouvée, la nourrice. 

Ne pouvant plus supporter ces injures et moqueries, elle fuit le foyer conjugal pour s’installer ailleurs avec son fils.  » Je suis aujourd’hui à bout de nerf. Je n’en peux plus… « , affirme la pauvre dame, la gorge nouée de douleur. 

Ph: DR

À Abobo-Clotcha, dame Chantal Kouassi dont l’enfant souffre également d’infirmité motrice cérébrale, n’est pas bien loti face au rejet, préjugés et stigmatisations de la société. Également abandonnée par son mari, elle s’est installée devant une maison, sous un abri de fortune pour vendre quelques marchandises. Mal lui en prit. Le propriétaire des lieux l’a expulsée des lieux. Raison avancée, il ne veut pas que le fils de la commerçante ‘’contamine ses enfants avec ses salives’’. Elle peine à croire, qu’un homme d’un tel niveau social, puisse entretenir une telle attitude.  » Il est pourtant un cadre de l’administration. C’est dommage qu’il raisonne ainsi. Cet enfant, je ne l’ai pas voulu ainsi. C’est la volonté divine. Je demande qu’on ait juste une petite considération et compassion pour nous les mères qui nous battons pour nourrir nos enfants’’, a-t-elle lancé, en larmes.

Enfant serpent

Non loin de dame Chantal, vit Sidibé Nabintou. Cette jeune dame a accouché, elle aussi, d’un garçonnet. Une récente bagarre l’a opposée à sa cousine. En effet, elle n’a pas apprécié que son enfant ait été traité de ‘’serpent’’ par sa propre Cousine.  « Avec ma belle-famille, c’est déjà compliqué. Que ma famille aussi ne vienne pas en rajouter », déplore-t-elle. Et de conclure ‘’ C’est Dieu qui donne les enfants. Un être humain ne peut pas mettre un serpent au monde’’.  

Si certains de ces enfants ont la chance de bénéficier de l’amour maternelle, ce n’est pas le cas de beaucoup parmi eux nés dans la même situation. Selon plusieurs témoignages recueillis, ces derniers sont abandonnés dans la nature par leurs géniteurs. « La plupart des mamans se retrouvent seules. Elles sont abandonnées après la naissance de l’enfant. Le mari fuit également le domicile conjugal. Se sentant impuissantes, certaines cachent leur enfant dans la maison quand d’autres les abandonnent dans la nature’’, soutient Mamie Awa, une sage-femme. 

Lire aussi : Dans l’univers des femmes qui font des enfants sans l’accord de leur conjoint

L’impossible accès à l’école

infirmité
Ph: DR

Pour Mamie Awa, un autre souci se pose, celui de l’accès au système éducatif.  Selon elle, c’est difficile, voire impossible pour les familles démunies d’inscrire leurs enfants dans le système éducatif normal.  » Les écoles refusent de les recevoir sous prétexte que leur personnel n’a pas la formation adéquate pour les suivre convenablement ». Cette situation a pour conséquences de les priver de la formation scolaire. Pourtant, qui est un droit fondamental de tout individu.  

Pour Madame Massandjé Touré, présidente de l’association des mères ayants des enfants souffrants de l’infirmité motrice et cérébrale, la situation est plus que dramatique. Revendiquant plus de 400 mères membres, elle soutient qu’il y a une lueur d’espoir. Son association se propose d’être un premier point de soulagement psychologique pour les mamans vivant cette situation.  « Il ne faut plus cacher vos enfants. Rejoignez-nous afin qu’on puisse leur donner un traitement », lance-t-elle. Elle plaide auprès de l’Etat pour que ces enfants soient reconnus au même titre que les autres. « Nos enfants doivent bénéficier de l’appui de l’Etat. Il faut surtout un centre spécialisé pour eux et la gratuité des médicaments… ».  

Ils ont besoin de notre amour…

Ils n’ont pas demandé à venir au monde avec un handicap. Leur maman non plus, n’ont jamais émis le souhait d’avoir des enfants souffrants d’infirmité motrice. La nature le leur a imposé. Ils sont là, respirent, mangent, dorment, comme vous et moi. Alors, pourquoi ne pas leur donner de l’amour ? Pourquoi ne pas contribuer à leur épanouissement dans la société ? Ces scènes de rejets de la mère et de son enfant, parce que souffrant d’une infirmité motrice, n’honore pas la société et particulièrement ceux qui en sont les auteurs. 

Vider une mère et son enfant du foyer et de la famille, parce que l’enfant qu’elle a mis au monde, ne serait pas comme les autres, est un acte déshumanisant. Une vie est une vie. Il revient à chacun de nous, d’accompagner les parents dans l’encadrement de ces enfants avec un regard compatissant, et non de dédain. Cela n’arrive pas qu’aux autres. Ces enfants ont besoin d’amour pour s’épanouir. Pourquoi ne pas leur en donner…

Lire aussi : Côte d’Ivoire/Viol de mineures : le calvaire des enfants

Djolou Chloé 

Ajoutez votre commentaire