Mireille Dosso est la directrice de l'Institut pasteur d'Abidjan depuis 2004.

Publié le 27 avril, 2020

La directrice de l’Institut Pasteur d’Abidjan était l’une des invités du débat africain, ce dimanche 26 avril 2020 sur RFI. Mireille Dosso, professeur de microbiologie au parcours professionnel remarquable, en a profité pour évoquer l’évolution du covid-19 en Côte d’Ivoire à cette émission animée par Alain Foka.

Qu’est-ce qui explique que l’Afrique soit l’un des continents les moins touchés ?

Ce qu’on constate quand même, c’est que les cas positifs touchent une tranche d’âge qui va de 20 à 50 ans. C’est une population active, une population jeune. Il y a peu de cas positifs chez des personnes de plus de plus de 65 ans, en ce qui concerne la Côte d’Ivoire. Et peu chez les enfants de moins de 10 ans. Je pense que nous avons un système immunitaire très sollicité de façon quotidienne dans nos pays. Parce que nous avons beaucoup de maladies infectieuses, parasitaires. Peut-être que nous avons un système immunitaire plus réactif… Peut-être aussi que les souches qui circulent actuellement présentent des virulences moindres. C’est pourquoi, il faut absolument faire des études concernant les souches virales qui sévissent actuellement chez les malades du continent africain, notamment au sud du Sahara.

Concernant la mortalité, je pense qu’on a oublié ce qui s’est passé au début de l’épidémie de Sida. Ce qui nous avait tous alerté, dans nos pays, c’est la mortalité chez les sujets jeunes. Il y avait beaucoup de jeunes qui mouraient. Donc, dans une épidémie, la mortalité est un élément très important à surveiller.  C’est un bon indicateur.

Pourquoi est-ce qu’on enterre aussi vite les personnes décédées du covid-19 ?

En ce qui concerne la Côte d’Ivoire on a laissé un délai de 72 heures. Dans tous les cas, on informe les populations des risques qu’il y a à manipuler les dépouilles et qu’il faut le faire dans des précautions strictes.

Est-ce que c’est parce qu’on fait ces rituels qu’on propage la maladie ?

Ce sont ces rituels qui permettent d’exposer ceux qui le font. Je pense, en ce qui concerne la Côte d’Ivoire, comme nous avons eu l’épidémie d’Ebola, il y a eu beaucoup de sensibilisation sur la gestion des décès à ce moment-là. Les populations ont été sensibilisées en ce qui concerne les rites funéraires lorsque qu’il y a ce genre d’épidémie.

Qu’en est-il de la recherche ?

En Côte d’Ivoire, il y a des chercheurs qui s’intéressent au covid-19. Certains ont commencé des études in vitro pour voir ses propriétés sur ce virus. Donc on doit aussi s’intéresser au réservoir des virus qui circulent dans la faune sauvage et de l’environnement. En ce qui concerne la Côte d’Ivoire, on l’a commencé depuis plusieurs années. Notamment surveiller les chauves-souris et les micromammifères pour voir la situation virologique concernant ces virus.

Comment ça se fait qu’on a l’impression que les chercheurs africains n’existent pas dans cet environnement, que vos recherches ne bénéficient pas de publicité ?

Nous publions nos recherches dans les revues internationales. Mais nous n’avons pas la marge de publication et la possibilité de publication qu’ont les équipes dans les pays occidentaux.

Propos recueillis par O.O.

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