Publié le 26 avril, 2021

Les peuples Atchan (Ebrié) sont situés au sud de la Côte d’Ivoire, plus précisément à Abidjan. Ils sont circonscrits en 63 villages. Chez ce peuple, pour être un véritable Atchan, il faut appartenir à une classe d’âge. Voix Voie De Femme lève un coin du voile sur l’histoire de ce peuple.

En pays Atchan, selon Fidel Danho, notable du village d’Anoukoua Kouté, lorsqu’on parle de classe d’âge, on fait allusion aux générations et catégories d’âge. Ce jeudi 22 avril 2021, le patriarche est entouré de plusieurs de ses collègues dans sa concession où il reçoit notre équipe de reportage.

« Nous avons 4 types de générations : les Bléssoué, les Gnandô, les Dougbô et les Tchagba », explique-t-il. « Dans chacune des générations, nous avons également 4 catégories qui sont : les Géhou, les Dongba, Agban, les Assokro. Pour constituer une classe d’âge, nous affectons à chaque génération une catégorie », explique la tête couronnée. Qui poursuit : «  Si nous sommes chez la génération Blessoué, on trouvera les Blessoué Géhou, les Blésoué Dongba, les Blésoué Agban, les Blésoué Assokro. Le processus est le même pour les autres générations ».

Comment sont constituées les classes d’âge ?

Les classes d’âge ont également leur mode de constitution. Dans la majorité des villages Atchan, elles sont constituées sur un intervalle d’âge qui va de 3 à 5 ans maximum. « Pour une personne qui a 60 ans, il peut appartenir à la même génération que des personnes ayant 60 à 65ans. Ceux dont l’âge est compris entre 55 à 59 ans rejoignent automatiquement la catégorie suivante. Parmi les 63 villages, une infirme partie fait la répartition en fonction des ordres de naissance d’une généalogie », explique Fidel Danho. Qui ajoute qu’en Ebrié chaque catégorie à une signification.

Les Géhou désignent le 1er enfant d’une famille, quand les Dongba concernent le 2e enfant. Les Agban et les Assokro indiquent respectivement le 3e enfant et 4e enfant. « Tu peux avoir 25 ans et être le 1er enfant de la famille. Un homme à la cinquantaine étant l’ainé de sa famille peut être de la même classe d’âge que le jeune homme de 25 ans. Ces villages respectent l’ordre des catégories », développe Djanne Mathieu, également notable à Anoukoua Kouté.

Après quelques minutes de silence, le notable Mathieu s’empresse de reprendre la parole. Et il dit : « il est difficile pour un jeune de connaitre sa classe d’âge. Pour la connaitre, il faut connaitre la génération au pouvoir.  C’est-à dire, celle qui dirige le village. Puis cherche à connaitre vos ainés. Si vous connaissez vos ainés, vous saurez automatiquement votre classe d’âge ». 

 Pour une personne qui est de la classe Dougbô Géhou, son frère ou sa sœur cadet sera de la classe Dongba. Si l’âge de ce dernier n’est pas compris dans l’intervalle d’âge fixé par la classe Dougbô Géhou. « Si l’âge de ce dernier est compris dans cet intervalle, il sera de la même classe d’âge que son ainé. »

Pourquoi les peuples Atchan font-ils les classes d’âge ?

« Nous faisons les classes d’âge pour la prise de pouvoir. Chaque génération est appelée à diriger le village. Sans les classes d’âge, nos villages n’auront pas de chef. Chaque génération dirige le village pour 15 ans. Une fois le mandat achevé, elle cède le pouvoir à leur cadet de façon pacifique  », révèle le notable Fidèle Danho. « C’est pourquoi, ajoute-t-il, lorsqu’un jeune atteint 18 ans, il doit chercher à rejoindre sa classe d’âge. »

Les classes d’âge regroupent les personnes de la même tranche d’âge. Chaque classe d’âge a son bureau dont un secrétaire est indispensable. Dans chaque classe d’âge, l’intervalle d’âge est fixé par l’ainée de la promotion. Quant au secrétaire, son rôle est de recenser ceux qui respectent les conditions pour être membre de la génération. « Une fois la liste des candidats établie, la génération en cours cherche un parrain. Car la responsabilité de présenter la promotion à la chefferie revient au parrain. Si la chefferie est convaincue de la maturité de génération en préparation, elle fixe la date de leur fête de génération », explique la patriarche Danho. « Chaque génération se prépare pendant 5 ans. Les classes d’âge ne concernent pas que les hommes, les femmes en font partie », détaille le notable Fidèle.

Le notable Djanne ajoute : « chaque  classe d’âge a son guerrier. Ce dernier est le miroir de sa classe d’âge. C’est en fonction du danseur guerrier qu’est jugée une classe d’âge. Alors il n’est pas choisi avec assez de critère. On le choisit après une longue observation des membres de la promotion. On prend quelqu’un de respectueux et sage.

Lorsqu’on choisit le danseur guerrier d’une classe d’âge, on l’attache des palmes (rameaux) sur la tête, les mains. Ainsi au passage les villageois savent qu’il est un danseur guerrier. »

Entre les catégories, il y a des alliances. Les Géhou sont alliés des Agban, alors ils choisissent le danseur guerrier de chacun d’eux. Quant au Dongba, ils sont alliés des Assokro, alors ils choisissent le danseur guerrier de leur allié.

Audrey Apie (stagiaire)

Ajoutez votre commentaire