Publié le 29 mars, 2021

Quelle place des femmes handicapées dans la célébration de la Journée internationale de la Femme ? Au terme de ce mois réservé à la promotion des droits de la Femme, VoixVoie De Femme a accordé une interview avec la présidente de l’Union nationale des femmes handicapées de Côte d’Ivoire (UNAFEHCI). Anne Cécile Konan espère plus d’action des pouvoirs publics dans la prise en compte de leurs besoins.

Le 8 mars de chaque année, le monde entier célèbre la Journée internationale de la Femme. Comment les femmes handicapées ont vécu l’édition de cette année 2021 ?

Ce mois de mars a été pour nous l’occasion de nous exprimer et de faire davantage connaître nos besoins et de savoir que nous comptons aussi dans la société. L’édition de cette année nous a permis de nous outiller à travers des séminaires de formation. Nous avons été heureuses d’être invitées par plusieurs organisations à savoir l’ONG Alliance-Côte d’Ivoire, l’Association des femmes journalistes nous a également soutenues. Nous avons pu participer à des webinaire de renforcement de capacité. Nous avons été réconfortées par l’action de l’ONG Voir, entendre et marcher. Cette ONG venue de France nous a offert gracieusement le pagne officiel.

Mais au-delà de la symbolique du pagne qui nous a profondément touchées, cette ONG nous a offert une tribune d’expression. Nous avons saisi ces occasions pour nous faire entendre et remettre en lumière nos besoins.

Quels sont les besoins pressent que les femmes handicapées ont pu exposer durant ce mois ?

D’abord nous avons un réel besoin de communication. A cause nos handicaps, nous n’utilisons pas les mêmes supports que les personnes sans handicap pour communiquer. Nous avons parmi nous tous les types de handicap.

Nous avons parmi nous des handicapées physiques, des aveugles, des personnes malvoyantes, des personnes atteintes de handicap visuel qui louchent, des personnes sourdes, des personnes malentendantes, des personnes handicapées de petite taille, des personnes ayant une déficience intellectuelle, des personnes atteintes d’albinisme, des personnes bossues…

Toutes ces personnes ont besoin d’accessibilité aux lieux publics. Des efforts ont certes été faits, mais la grande majorité des femmes handicapées n’ont malheureusement pas accès à certains lieux publics.

Et même au sein des femmes, nous avons le sentiment que les femmes en situation de handicap ne sont pas prises en compte en tant que telles. Dans la formulation des besoins des femmes, la spécificité des femmes handicapées n’est pas prise en compte. Nous avons profité de l’édition 2021 de la célébration de la Journée internationale de la Femme pour exposer ces besoins.

Avez-vous déjà fait des plaidoyers qui n’ont pas été pris en compte ?

Au début de la crise sanitaire de la Covid-19, le gouvernement a annoncé son soutien aux entreprises de femmes. Les femmes handicapées entrepreneures n’ont pas été suffisamment soutenu par ces programmes. Nous déposé nos dossiers dans les trois ministères de tutelle. Il s’agit du ministère de la Solidarité, celui de la Famille, de la femme et de l’enfant, puis le ministère de l’Emploi. Nous n’avons rien reçu. Pourtant si on considère que la femme fait partie des groupe vulnérable, cela veut dire que la femme handicapée est doublement vulnérable. A cause de cette double vulnérabilité, nous souhaitons être traitées avec plus d’égard. Cette spécificité devrait être clairement formulée par les politiques en faveur des femmes. Nous avons profité du mois de mars pour exposer nos besoins et ces problèmes qui nous tiennent à cœur.

Avez-vous le sentiment d’avoir été entendues quand vous avez rappelé ces besoins ?

Nous avons recensé plus de 1 700 femmes, dont 450 à Abidjan, en situation vulnérables que nous avons présenté la liste dans le cadre de la Covid-19. Mais cette liste n’a jamais été prise en compte. Celles qui ont été prises en compte l’ont été dans un cadre général, pas en tant que femme handicapées. Très peu de femmes handicapées ont pu bénéficier de ces fonds. Seulement à peine une dizaines de femmes handicapées d’Abobo et d’Attécoubé, ont pu bénéficier de ces aides sur les 1700 recensées. Mais nous ne désespérons pas.

Quel message avez-vous à l’endroit de ses femmes en situation de handicap, en cette fin  du mois de mars ?

A l’endroit de nos membres je voudrais répéter que le handicap n’est pas une fatalité. Ce n’est pas parce que nous sommes dans cette situation que nous allons nous y résigner et exiger que des gens nous viennent à l’aide. Nous devrons plus que jamais nous mobiliser et prendre notre destin en main. Nous devrons faire en sorte d’être vues. Parce que quand on est caché, on ne peut pas être pris en compte. Nous devons nous faite connaître et faire connaître nos besoins. 2

Et à l‘endroit de toutes les femmes de Côte d’Ivoire, y compris celles sans handicap, nous exhortons à une mobilisation dans l’unité. Il faudra qu’on reste ensemble. Nous, en situation de handicap, nous allons faire connaître nos besoin et qu’ensemble nous les portions dans la solidarité. Je pense que cela nous permettra de partager nos connaissances.

Aux pouvoirs publics ?

Nous sommes des femmes. Si les femmes sont considérées comme vulnérables, cela veut dire que du fait de notre situation de handicap, nous sommes doublement vulnérables. Donc nous souhaitons que dans la formulation de tout programme que le gouvernement puisse prendre en compte nos besoins.

A l’ensemble des Ivoiriens, nous exhortons à la paix. Parce que rien n’est possible sans paix. Quand il n’y a pas de paix, les personnes handicapées sont celles qui payent le plus lourd tribut. Et l’absence de paix augmente le nombre d’handicapées et cela n’est pas souhaitable pour la nation ivoirienne que nous voulons construire.

Ténin Bè Ousmane

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