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Publié le 22 août, 2022

Les plats culinaires composés de viande de chien, chat, serpent, autrefois très peu courtisés, ne le sont plus aujourd’hui.  Tant la chair de ces animaux est de plus en plus prisée. Chaque commune d’Abidjan regorge de ces domaines bien connus, ces petits coins spécialisés dans la cuisine et la vente de ces espèces domestiques, compagnons légendaires des hommes. Ces nouveaux amoureux de viande de chat et de chien savent où trouver ces plats qu’ils affectionnent tant. Pour les initiés, c’est une affaire de tradition. D’autres même parlent de spiritualité, de protection mystique voire de santé ou de force. Notre reportage !

Nous sommes à Gesco, un quartier précaire et peuplé de la grande commune de Yopougon. Après des renseignements, nous sommes conduis vers une gargote. Là dans ce lieu que les gens qualifient de restaurant, nous sommes accueillis par une odeur spéciale. Sûrement l’un des menus très atypique de ce petit coin sans étiquette. Le décor est aussi particulier que les mets qui y sont préparés. Feu de bois, couvert en ‘’Talier’’, chaise en bois, gobelet en caoutchouc…, on se croirait dans un restaurant de la campagne. Sous un hangar, des clients attendent avec impatience que le repas soit prêt à être servi. Ça fait plus d’une heure qu’il est là. Benoit H. n’en peut plus d’attendre, il réclame une énième fois son plat à la cheffe cuisinière du coin que les clients appellent affectueusement maman Odile.

Une affaire de passion…

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Tenant en main une boisson africaine pour, dit-il, ‘’se creuser le ventre’’, Benoit H est enfin heureux d’entendre de la part de ‘’Maman Odile’’ qu’enfin le plat est prêt. « Mon frère on te sert quoi ? », questionne la patronne des lieux avant d’informer sur le menu du jour. « Il y a la soupe de chat, serpent et crocodile… », précise-t-elle. Benoit H n’entend pas qu’elle finisse, il passe immédiatement sa commande.  » Je veux un bon plat de riz accompagné de viande de chat. Ma partie préférée que tu connais, la tête stp », annonce-t-il.

Pour Benoit, la consommation de ces plats que certains qualifient d’insolite est une passion. « C’est devenu une pratique gastronomique pour moi et mes amis. Chaque samedi, nous y venons consommer ces plats succulents », indique-t-il fier. Aussitôt son plat servi, il prend un plaisir à le consommer. « Je mange le chat par plaisir », raille-t-il.

Selon Adjoumani, un autre qui est devenu friande de la chair du chat, il fallait qu’il soit initié comme la plupart des jeunes de son quartier. « Que répondez-vous à propos de nombreux préjugés autour de la consommation de ces viandes dont certaines maladies comme la tuberculose, asthme, etc. ? », questionnons-nous. « J’avais un peu peur parce qu’en plus cela ne fait pas partie de nos cultures. Mais avec le temps, aujourd’hui je mange au-moins un plat par semaine », avoue-t-il.

Des adeptes de plus en plus nombreux

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Pour Fatou, une vendeuse de viandes de ces animaux à Mossikro, un autre quartier précaire de Yopougon, « depuis quelques années, je reçois de plus en plus de clients. Et ce ne sont plus seulement les vieux, même les jeunes sont maintenant nombreux à venir manger chez moi », rapporte la dame. L’une des raisons de cette hausse des adeptes de ces menus, selon quelques-unes des personnes rencontrées qui aiment ces viandes-là, c’est le côté mystique de l’animal. En effet, pour ces derniers, le chien et le chat sont des animaux mystiques et la consommation de leur chair procurerait une protection face aux attaques mystiques (sorcellerie) et aux sortilèges.

‘’Quand nous mangeons la viande de chien, les sorciers ne peuvent rien contre nous’’, témoigne Sibo, consommateur de chien.

‘’ La biche rouge’’ pour le chien, ‘’le lapin’’ pour le chat et ‘’le poisson gris’’ pour le serpent, ce sont des expressions utilisées dans le milieu pour désigner ces plats. 2000 Fcfa à 3000 francs CFA, c’est la somme que déboursent les consommateurs généralement.

Ces viandes rares à en trouver

Après plusieurs minutes de négociations, une tenancière de restaurant au menu très particulier accepte de répondre à nos questions. « Ce n’est pas tous les jours on gagne ça. C’est pourquoi j’ai les numéros de mes clients. Quand j’ai une livraison, je les appelle pour les prévenir et ils font leurs réservations », informe-t-elle avant d’affirmer que « Ce ne sont pas les vieux seulement qui consomment ces mets. C’est tout le monde : les jeunes, les vieux, les boss …Tout le monde ! », confie-t-elle. 

Et même les femmes…

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Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, les femmes font également partie de ces amoureux des plats ‘’insolites’’. La raison évoquée par celles-ci, « La consommation de ces viandes fait partie de notre culture et mieux, elle facilite l’accouchement », renchérissent-elles. Vrai ou faux ! Toujours est-il qu’elles se font plaisir chaque fois qu’une commande est signalée par la tenancière d’un restaurant.

Dans la capitale, la consommation de la viande de chien, chat et serpent pour des raisons diverses, est devenue l’affaire de tous au point où les restaurants spécialisés dans sa préparation se multiplient et le nombre de nouveaux adeptes, en hausse. ‘’On devrait penser à élever les chiens, les chats et les reptiles comme on élève les moutons, les poulets, les porcs pour la consommation parce que c’est une viande comme les autres’’, proposent plusieurs adeptes.  

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Mam Ouattara

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