Kouamé Akissi Julie épouse Esse, mère de 4 enfants dont trois filles et un garçon. Passionnée de chapellerie, Julie Esse est aujourd’hui l’une des pionnières dans ce domaine en Côte d’Ivoire. Découvrez le parcours de cette femme dévouée. Voixdefemme.net
- Elle rêve d’un doctorat en sociologie!
Après son échec au Bac au lycée classique d’Abidjan en 1998, elle se marie en 2000 et reste mère au foyer jusqu’en 2019 où elle reprend le chemin de l’école. Elle obtient son baccalauréat en cours du soir. Elle n’est pas totalement satisfaite !
« Je me suis dit que le Bac ne suffisait pas », raconte-elle, dévouée à aller de l’avant. Elle dépose ses dossiers à l’Université Félix Houphouët Boigny d’Abidjan. Son dossier retenu, elle est en Licence de sociologie et espère obtenir le Doctorat. Un vrai exemple de femme persévérante pour ses études mais qui a aussi bien de facettes étonnantes, de passions. Également, à son actif, de nombreux prix glanés çà et là grâce à sa qualité de Maître-artisane.
Comment est née la passion pour les chapeaux ?
Étant petite, j’aimais bricoler de mes propres mains. Je faisais la broderie, je m’intéressais aussi à la décoration. C’est en 2002, j’ai vu un foulard sur la tête d’une dame qui m’avait beaucoup impressionnée. J’ai donc demandé à mon témoin de mariage de m’apprendre à nouer les foulards car elle était couturière. C’est ainsi, j’ai noué mon premier foulard où tout a commencé. J’ai commencé à m’intéresser à tout ce qui était en rapport avec les foulards, les chapeaux. Mais malgré mon autodidacte dans la confession de chapeaux, je ne me suis pas limitée au talent. J’ai suivi des formations pour renforcer mes capacités techniques dans les pays comme le Nigeria, l’Afrique du Sud et même la France où j’ai effectué un stage.
Avez-vous un atelier de fabrication et de vente de vos créations ?
Oui, j’en ai un qui est « Rochesli Création » situé à Abidjan Cocody en face du CHU.
L’idée de création du cabinet de formation
Au départ, j’avais que des boutiques. Toutes les déclarations étaient liées à la forme boutique. Mais après, j’ai connu des troubles avec la Covid quand je me retrouvais avec mes trois magasins fermés. Pendant ce temps, j’avais 7 filles avec qui je travaillais. Du coup nous nous sommes retrouvées complètement à plat. Mais je me suis dit, il fallait passer à un autre niveau d’où l’idée de création du cabinet de formation.
Quelles sont les difficultés de ce domaine d’activité ?
Ce métier est beaucoup développé en Afrique anglophone qu’en Afrique francophone. Vu que cela est nouveau en Côte d’Ivoire, les banques n’ont pas forcément confiance en vous. Les premières questions qu’on vous pose déjà, c’est très difficile d’avoir un appui financier. Il est clair, que les femmes portent de plus en plus les chapeaux en Côte d’Ivoire ; mais pas comme dans d’autres pays où les gens en font un métier. A cet effet, les structures de financement ont du mal à accompagner les personnes qui s’y intéressent. Ensuite, nous avons des difficultés d’approvisionnement avec les fournisseurs. C’est un marché plus anglophone donc nous sommes obligées d’aller au Nigeria pour s’en fournir.
Parlez-nous de votre matière de travail
La matière principale de la chapellerie c’est le sisal tiré d’une plante qui vient de Philippine. Nous travaillons beaucoup aussi avec les toiles africaines qui viennent d’ailleurs et d’ici telles que les pagnes baoulé…
Et de la concurrence…
C’est vrai il y a des concurrentes et il y en aura toujours. Mais, il faut être sûr de son projet. Et nous n’avons pas peur.
Comment se déroulent les sessions de formation ? Leur durée ?
Mon cabinet a eu un agrément de 60 heures de cours. Et lorsqu’on les planifie quelques fois, nous avons 2 (deux) ou 3 (trois) mois de formation. J’ai commencé avec 10 femmes, ensuite 20 autres ainsi de suite. Aujourd’hui nous sommes à la 9ème session.
Quels sont les critères et le niveau exigé pour suivre la formation
Pour être formé dans mon cabinet, il faut juste savoir lire et écrire. Mais, les femmes qui ne savent ni lire ni écrire et qui ont des aptitudes en fabrication de création sont toutes acceptées. C’est payant, parce qu’on paye les charges et achète le matériel de travail.
A ce jour, combien de femmes ont été formées ?
Dans mon cabinet, 81 femmes ont été déjà formées venant de plusieurs pays africains. Nous avons un retour très positif de leurs œuvres et j’en suis très fière.
Pourquoi avez-vous choisi ce domaine d’activité
C’est vrai qu’au niveau du ministère de l’artisanat, en tant que maître artisan, je pouvais transmettre mon savoir. Mais pour former, travailler avec des institutions, il fallait avoir un cabinet ou une école de formation. Mon objectif est de former davantage, laisser un héritage à mes sœurs ivoiriennes et africaines.
Un conseil à l’endroit des femmes et filles
Ce que j’aimerais dire aux femmes et aux jeunes filles c’est d’être courageuses. Il faut dire que l’entrepreneuriat paye, on y sort toujours gagnant. Ayez cette capacité de transformer toutes les situations en opportunités. Même si les parents ne se sont pas occupés de vous, à un certain âge vous devriez créer quelque chose de vos propres mains afin de vous prendre en charge. Même si vous avez raté certaines choses au cours de votre vie, vous pouvez toujours les rattraper. Je lance un appel aux femmes Africaines qui veulent faire carrière dans ce domaine de venir se faire former. Car nous avons déjà formé des femmes venant du Nigéria, Cameroun, Congo, Gabon, de la Zambie….
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Yahafe A. Ouattara (stagiaire)