« C’est combien ce livre ? Et ça ? » Les yeux baissés, ce commerçant a l’air bien ennuyé quand un client lui demande ses prix. Que diable répondre quand tout le monde se plaint de la situation ? « Tout est devenu cher en Côte d’Ivoire », soupire Mohamed Maïga.
Debout dans son modeste stand de livres et de librairies par terre, situé à l’entrée du marché de DjèKonan de Koumassi, ce quinquagénaire a le cœur lourd et les idées grises comme le ciel d’Abidjan. « Les clients n’arrivent pas à acheter comme avant, car tout a augmenté », chuchote maintes fois M. Maïga. Tout ou presque !
Le kilo de pommes de terre et de riz, le poisson, les pâtes, la viande, la portion d’attiéké (semoule de manioc typique de Côte d’Ivoire), la plaquette de trente œufs, le litre de gbêlê (un alcool local) ou d’huile de palme, l’essence, les sandwichs… Même le précieux cube de bouillon est passé de 25 à 50 F CFA.
« Et voici la rentrée qui se présente à nous, comment allons-nous faire ? », se plaint Madame Elodie Sangaré, mère au foyer qui a deux (02) enfants à sa charge.
Ces enfants, Mariam et Rahim sont tous les deux âgés de 11 et 08 ans. Et vont dans une école publique de la place. Cette mère célibataire nous montre l’estimation de ses dépenses qui l’attendent durant cette rentrée scolaire 2022-2023.
L’inflation pèse sur la rentrée scolaire
À quelques semaines des dates officielles de la rentrée scolaire, nombre de ministères dédiés à l’Enseignement sont déjà sur le pied de guerre. Une nouvelle année académique libérée des contraintes de la pandémie de la Covid-19, mais une année qui ne manque pas de défis.
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À l’échelle domestique, les parents tardent bien souvent à inscrire les enfants pour la nouvelle année et investissent le crédit bancaire dédié à la scolarisation dans des dépenses d’urgence sans rapport avec les équerres, cahiers et autres fournitures scolaires. Pourtant, comme le démontre un débat socio-économique en Côte d’Ivoire, les études de la progéniture s’annoncent plus onéreuses à la rentrée 2022-2023.
« L’inflation ne concerne pas que le blé, le carburant ou les denrées alimentaires… », estime Étienne Kouassi. Le directeur d’une école primaire d’un quartier de Marcory, à Abidjan, appréhende cette reprise. « Les parents sont acculés, même moi qui suis fonctionnaire, je subis cette inflation. », s’alarme-t-il.
Des prix à couper le souffle
L’arrivée du mois de Septembre, et, avec lui, les « dépenses de la rentrée », sur lesquelles l’inflation vient peser, font hurler de terreur les parents d’élèves à la vue de « certains prix inopinément exagérés dans les librairies et stand par terre ».
Pour Madame Sangaré, l’an dernier, en amont à la même date, si elle se voyait « acheter un livre de mathématiques niveau CE2 au prix de 3 000fr dans une librairie à terre », aujourd’hui, elle se voit payer ce dernier à « 5 000fr ».
Entre manuels scolaires, uniformes et scolarités, ils ne savent plus vraiment où donner de la tête. Les livres déjà utilisés constituent donc, pour des parents, la bouée de sauvetage. « Utiliser des livres qui ont déjà servi, est entré dans les habitudes’’, déclare ce parent d’élève qui révèle que même les plus riches achètent des manuels usagés, à la seule condition, bien évidemment, qu’ils soient en bon état.
« J’ai dépensé près de 150.000 F CFA pour les manuels scolaires de mes deux enfants qui sont dans le secondaire’’ révèle Mme Koné, une mère de famille. « Je n’ai pas pu acheter de livres usagés, car leur école a exigé de nouvelles éditions cette année. Je n’ai pas non plus réussi à vendre les vieux manuels de mes enfants’’, déplore-t-elle.
Des prix venus d’un autre monde, celui de « l’inflation mondiale ». Fournitures, cantine, transports, internat pour les familles qui y ont recours, accueil et activités de loisirs, l’évolution de chacun de ces postes est observée avec attention par les associations.
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Cédric Allangba