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Les langues maternelles sont reconnues comme étant le premier moyen de traduire véritablement le sens du monde. Pourtant, en Côte d’Ivoire, elles sont de moins en moins pratiquées au détriment du Français, y compris dans les foyers.

Cécilia, 18 ans, se déclare baoulé. Dans un français limpide, elle avoue qu’elle ne comprend pas grand-chose dans cette langue nationale. « Certes, je comprends quelques mots, mais je ne peux pas parler le baoulé ». Cécilia a passé une grande partie de son enfance à Bondoukou, ville du nord-est ivoirien, en pays koulango, langue qu’elle parle d’ailleurs mieux. « Je suis baoulé, persiste-t-elle. Ma maman parlait rarement la langue avec moi. Mais avec mes amis, c’était le français ou le koulango », explique-t-elle.

Comme Cécilia, une bien de personnes en Côte d’Ivoire ne parlent pas ou ne parlent plus leur langue maternelle. D’autres, comme Marina, 23 ans, ne comprennent rien des langues dont ils se revendiquent. « Je suis née d’un père agni et d’une mère sénoufo. Je ne parle aucune de ces langues. Mes deux parents ne se parlaient qu’en français à la maison », révèle cette mère de trois enfants, qui, eux, n’ont pas de choix face au français, langue officielle…

Quatre ans après l’adhésion, en 2016, de la Côte d’Ivoire à l’Initiative ELAN-Afrique, un programme visant à appuyer les pays d’Afrique subsaharienne francophone dans la mise en œuvre d’un enseignement bilingue (langues nationales-français), les langues maternelles restent encore largement inféodées par le français.

A qui la faute ?

Pour Akou komi Joseph, censeur au lycée moderne Nangui-Abrogoua d’Adjamé, nos pays africains et particulièrement la Côte d’Ivoire sont sérieusement menacés d’acculturation. « Les Indiens ont connu la même situation. Ils sont devenus des Américains ou des Anglophones. Aujourd’hui, en Côte d’Ivoire, lorsque vous rencontrez un individu qui est censé parler la même langue maternelle que vous, si vous l’abordez dans cette langue, il sursaute de surprise ! Et pourtant, il ne faut pas avoir honte de parler sa langue maternelle », conseille l’éducateur. Qui se félicite de constater que certaines personnes font des efforts d’imposer leur langue sans complexe.

C’est justement le cas de Silué Fatogoma. « Tous mes enfants parlent le Sénoufo quel que soit leur niveau d’étude », souligne ce père de famille. « La langue maternelle est primordiale dans notre société. Elle permet de garder les pieds dans la traduction et la tête dans le monde moderne. C’est le socle même de l’homme. Le français, on l’achète pour le mettre dans la tête de l’enfant. Mais la langue maternelle est naturelle », défend-il.

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Mme Diaby Assiata épouse Cissé est confiante pour l’avenir du PEI (Ph: DR)

Selon une étude de l’UNESCO diffusée en 2002, pas moins de 5 500 langues sur 6000 dans le monde disparaîtront d’ici à un siècle et seront devenues des langues mortes. Ce qui veut dire que 90 % des langues dans le monde seront liquidées au cours de ce siècle.

Pour préserver ces langues de ce « massacre » l’organisation onusienne célèbre chaque 21 février de l’année la journée internationale de la langue maternelle.

 Depuis 16 Mars 2016, elle s’engage aux côtés du gouvernement ivoirien à promouvoir l’utilisation des langues maternelles comme vecteur et outils d’enseignement à l’école.

C’est dans cette dynamique que le gouvernement ivoirien a mis en place un Programme d’école intégrée (PEI), dirigée par Diaby Assiata Epse Cissé.

« Dans l’initiative ELAN, nous sommes en train d’expérimenter l’approche de la lecture-écriture. Nous allons procéder à la généralisation de l’enseignement bilingue, français et langues maternelle », avait promis l’an dernier, Mme Diaby, précisant que la Côte d’Ivoire a identifié 10 langues maternelles pour cette opération. 26 écoles utilisent déjà les langues maternelles et le français pour l’enseignement au primaire, dans le cadre du PEI.

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Audrey Apie (stagiaire)

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