La Côte d’Ivoire est connue pour son hospitalité. La chaleur de ses fils et filles, la bonne humeur entre compatriotes, c’est aussi grâce aux alliances interethniques contractées par les ancêtres.
Les alliances inter-ethniques représentent en quelque sorte un pacte de non-agression entre des peuples. Au-delà de la non-agression, ce pacte autorise les groupes ethniques à plaisanter entre eux. Les limites sont repoussées, l’un des groupes peut lancer des invectives ou même des offenses sans risque de se voir agresser par l’autre groupe.
La tradition orale raconte que cette pratique a été instaurée il y a très longtemps.
Selon les historiens, l’origine de ce système remonterait à l’antiquité africaine dans la vallée du Nil. Il serait un héritage du totémisme pratiqué durant cette époque, ou chaque clan était associé à un animal ou un végétal totem. Aujourd’hui en Afrique noire, bon nombre de noms claniques sont associés à un animal totem.
Bien plus qu’un simple jeu, ces relations sont, sans aucun doute, un moyen de désamorcer les tensions entre ethnies voisines ou entre clans familiaux.
Les alliances interethniques sont un phénomène social, caractéristique des relations humaines. De même qu’il existe dans certaines sociétés, certaines civilisations des échanges et des hiérarchies entre les membres de familles, de même il existe des liens entre les membres de clans différents.
« Le Pacte de non-agression » est un phénomène social en Côte d’Ivoire et partout en Afrique. Il autorise un groupe à plaisanter avec un autre groupe et à même injurier l’autre groupe sans risque de se voir agresser. Lorsqu’il y a une alliance entre deux groupes ethniques, l’un peut empêcher un enterrement. L’allié qui se trouve ainsi coincé est obligé d’offrir à son allié tout ce qu’il exige. Tout se passe sous fond de négociations et surtout sans querelles.
Dans une alliance interethnique, il est censé avoir une ethnie qui domine et l’autre est considéré comme l’esclave. L’esclave, dans la pratique, doit tout à son chef. Cependant, une ethnie chef devient à son tour esclave d’une autre et ainsi de suite. Mais force est de constater que par ruse, chaque ethnie s’autoproclame chef et considère les autres comme esclaves. Seuls les garants de la tradition savent exactement quelle ethnie est chef et qui est esclave. Les alliances ethniques donnent occasion à des plaisanteries qui ont pour seul but l’autodérision puisque l’on doit accepter, sans rancune, le regard critique de l’agresseur sur sa propre culture.
L’avantage des alliances inter ethnique est qu’elles représentent un facteur de paix entre les différentes ethnies à cause du pacte de non-agression et d’assistance mutuelle qui les lient entre elles.
L’idéal serait donc que le peuple ivoirien revienne sur cette tradition afin de consolider l’amour et la tolérance.
En Côte d’Ivoire il y a plusieurs ethnies qui ont le jeu des alliances. On peut citer entre autres Sénoufo-Koyaka, Sénoufo-Yacouba, Agni-Baoulé et Abron-Koulango.
Dans une situation de conflits, l’on peut passer par l’allié des différents peuples en conflits et les mettre en mission pour régler leur litige. Un allié n’a point le droit de manquer de respect à l’autre. Ainsi, les conflits ne peuvent pas se prolonger. L’union, l’entente, la fraternité et la solidarité sont ainsi renforcés et préservés par le jeu des alliances. Un trésor à exploiter.
Sékongo Naoua