En marge de la visite d’État du président de la République dans la région de la Marahoué, la ministre de l’Assainissement et de la salubrité, Anne Désirée Ouloto a remis, le 25 septembre dernier, les clés de 168 latrines construites dans 28 écoles de la région. Un ouf de soulagement.
Après avoir remis les clés des 168 latrines, il va falloir encore sensibiliser élèves et personnel éducatif à les fréquenter. Et… à ne plus aller en brousse comme ils en ont l’habitude. « La défécation à l’air libre est une situation dégradante qui suscite un sentiment de honte », a insisté Anne-Désirée Oulotto, s’adressant aux élèves de l’École Primaire Publique (EPP) Gouénéfla, village de la sous-préfecture de Sinfra…
En Côte d’Ivoire, le taux de défécation à l’air libre reste élevé. L’an dernier, il était estimé à 39 %. Au total, 7 306 écoles en milieu rural n’avaient pas de latrines.
Au-delà la honte, le fait de se soulager à l’air libre expose à des maladies. Par exemple le choléra et toute les formes de diarrhée, la fièvre typhoïde, la poliomyélite. En Aout dernier, lors de la pose de la première pierre d’un collège dans la région, la directrice régionale de l’Éducation, en insistant sur la construction de latrines, évoquait les dangers auxquels les élèves s’exposent quand ils n’ont pas d’autre choix que de se soulager en brousse. « L’eau de ruissellement des pluies transporte aussi facilement les déchets humains, déposés çà et là, à même le sol, pour contaminer les eaux de puits et de Marigot. Tout contact avec ces eaux souillées est la porte ouverte aux maladies liées au péril fécal », prévient Saïd Christophe agent de santé.
L’absence de latrines dans les écoles est une réalité dans la région du Gôh. Disposer de latrines à l’école relève même de luxe dans certains établissements. C’est le cas dans la sous-préfecture de Guepahouo, dans le département d’Oumé. Sur 8 écoles primaires, seulement deux (2) disposent des latrines. « Les élèves se débrouillent dans la brousse », regrette Tra Bi Paul, un parent d’élève.
« Notre chance c’est que nous n’avons pas encore enregistré de cas déplorable lié à la défécation des élèves en brousse. Mais il ne faudrait pas attendre que le pire se produise avant d’agir. C’est maintenant qu’il faut construire des latrines aussi bien pour les élèves que pour les enseignants. Cela éviterait beaucoup de choses », plaide Kouamenan Jean Michel, instituteur dans cette localité.
La brousse pour se soulager
Les enseignants disent avoir interpellé les cadres locaux sur cette situation. En vain. Dans la ville de Gagnoa, capitale régionale, la situation est hélas, pareille. en fait, si elles existent, les latrines sont souvent dans un état de dégradation avancée.
A Divo, dans le Lôh Djiboua, plus précisément à l’école du Plateau, l’infrastructure est devenue impraticable. « Nous n’avons pas de latrines. Élèves et enseignants sont livrés à eux-mêmes en cas de besoin pressant », se désole Blé Marcel, instituteur. Il explique que les fosses septiques se remplissent vite parce que le nombre d’utilisateurs a augmenté à cause du taux élevé de scolarisation. « Mais, poursuit-il, il n’y a pas de mesures d’accompagnement à travers la construction de nouvelles latrines, ajoute notre interlocuteur, les riverains viennent nuitamment utiliser les latrines de l’école ».
A qui la faute ? Le ministère de l’Education nationale pointe du doigt les Comité de gestion des établissements scolaires (COGES). « En principe c’est l’affaire du COGES. Ce sont ces structures qui doivent lever des cotisations pour réaliser ces travaux. Mais il faut reconnaître que les moyens dont dispose le COGES sont insuffisants pour faire ce travail. C’est pourquoi la construction de latrines figure dans le plan social du gouvernement », confie une source proche du ministère de l’Education nationale.
Un projet financé par le programme social du gouvernement vise a doter les écoles du pays de plus de 1800 latrines en matériau durable. Elles sont en construction dans les écoles primaires publiques de 300 villages, selon notre source.
Aussi faut-il noter que la politique actuelle de construction des écoles impose la mise à disposition des latrines. C’est le cas du collège de proximité en construction dans la sous-préfecture de Dahiépa Kehi, dans le département de Gagnoa. À la cérémonie de pose de la première pierre la directrice régionale, Amonkou Valentine, a même salué l’initiative du promoteur d’avoir pris en compte de latrines dans la réalisation de ce projet. Conscients de cette situation de menace sanitaire sur les élèves, les responsables de la mine d’or d’Agbaou, dans le département de Divo ont pris le soin d’ajouter à l’école primaire offerte aux populations, des latrines avec dispositif de lavage des mains…
Alain Doua