Après avoir été frappé de plein fouet par deux périodes difficiles, notamment celle de la Covid-19 et l’élection présidentielle, la vie semble avoir bien repris son cours normal. Le jour comme… la nuit.
« La nuit c’est la nuit. Tous les chats sont gris ! ». Ce vers de cette célèbre chanson du groupe de Zouglou Espoir 2000 est bien d’actualité ce cette nuit du 2 décembre 2020.
La journée, c’était un jour ouvrable. Mais à cette heure, 20 heures passé de 40 minutes, nous sommes de plain-pied dans la distraction des ‘’initiés’’, nom que nous attribuons aux habitués de la nuit. Nous sommes au carrefour Menuiserie à l’arrêt Dokui. L’ambiance qui y est, ne laissent pas indifférents. Jeunes, adultes, chacun y trouve son compte.
Les plus âgés optent pour les espaces plein airs, lorsque les plus jeunes préfèrent s’installer dans les endroits plus ambiants. A cette heure, il semble déjà difficile de s’installer à la Côte d’Azur (maquis ambiant). Plus de place ! Les ‘’consommateurs’’ ceux à qui ont sert à boire, profitent visiblement de l’atmosphère. Ils chantent, dansent, boivent, papotent entre amis, ou passent du temps en amoureux.
« Si tu ne viens pas à temps c’est difficile de trouver de la place », se plaint Eric E, un habitué du bar. Il doit retourner tout triste. Ce maquis selon Eric, reçoit plus de 80 clients au quotidien. « C’est très intéressant. Surtout les jours de zouglou live. On n’en parle pas. C’est tellement débordé que certains font le choix de s’installer prêt du goudron », explique-t-il.
Si la ruelle est autant animée, cela est à l’avantage des travailleurs, des propriétaires d’établissements de nuits. Mais aussi des commerçants autours. A. Antoinette y travaille depuis bientôt un an. « On arrive à vendre plus de 50 000 FCFA par jour. De quoi à gérer nos petites dépenses », révèle-t-elle. Non sans se souvenir avec amertume des moments difficiles. C’était durant les mois de mars, avril, mai, juin et juillet… A cause de la Covid-19, ces bars et autres maquis avaient été enjoints de fermer pour observer les mesures barrières. « Nos recettes ont été considérablement réduites pendant la covid-19. Mais quand les choses ont commencé à reprendre, les élections présidentielles et la crise politique nous ont replonger dans la galère », se souvient la vendeuse de poisson dont l’étal est très achalandé. A présent ces crise semblent derrière… à la grande joie de Antoinette et tous ces vendeurs qui pullulent autour de ces bars et maquis. « Je rentre vers 3 heures du matin, pour me réveiller au moins à 10 heures. Le temps de cuisiner et de faire mon marché et de m’apprêter pour le soir », avoue-t-elle.
Antoinette à bien raison. Le Soukala bar, sis à quelques encablures de son lieu de vente vient de rouvrir ses portes depuis quelques semaines. Mathieu K dit le Babatchè, et fidèle client ne peut oublier cette période. « La nuit est pour nous la journée et la journée pour nous la nuit. Je m’ennuyais grave. Je suis plutôt habitué à m’asseoir là tous les soirs, la fermeture était difficile pour nous aux mêmes titres que les travailleurs », admet-il.
Ce jeune homme, la trentaine révolue, est connu pour son goût prononcé pour le vin mousseux. Dans ces bars, il existe plusieurs compartiments. Mathieu est toujours au VIP. Ce n’est pas pour rien qu’on l’appelle le Babatchè ( le fortuné ». Aujourd’hui, il y est comme à ses habitudes. « Il ne s’assoit qu’au VIP. Or pour y être il faut le vin mousseux vendu à 10 000 FCFA l’unité. Je me demande bien comment il obtient son argent », s’interroge un habitué de l’espace.
A l’instar des autres endroits de divertissement, cet endroit réunit des consommateurs de tous genres. De toutes les professions y trouvent pour leur compte. Policiers, Journalistes, étudiants, haut cadre de l’administration… et autres charmeurs…
Autre lieu, autre ambiance. Rivera Anono. Il est 00 heures. A la différence du Plateau-Dokui, les consommateurs choisissent des endroits fermés, et dont l’espace à l’intérieur est grand. Ici, c’est plus discret à l’extérieur. Pas de vendeur dans les rues. « En ce moment ils vendent peu et rentre tôt. Surtout les jours ouvrables. Il n’y a pas trop de monde dehors en fait », fait savoir Adama G, riverain.
Quelle importance ?
Selon Guy Hervé, gérant de bar qui comptabilise 7 ans d’ancienneté, l’apport des établissements de nuits dans l’économie est d’une grande importante. Néanmoins, il reconnait. « Pour les recettes tout dépends du local, mais je peux dire que la recette minimum tournait autour de 350 000 FCFA dans notre établissement », révèle le gérant du bar discothèque Ferrari, fermé en ce moment pour travaux. « Le milieu de la nuit emploi de milliers de personnes et donc ceci réduit la délinquance », explique cet opérateur économique. Selon lui, ces entreprises qui fonctionnent à temp plein la nuit, sont bien celles qui nourrissent les artistes. En plus des prestations qu’ils sont souvent appelés à donner en direct, il paye aussi des taxes au Bureau ivoirien des droits d’auteur (Burida). Ne serait-ce que pour les œuvres qu’ils font jouer pour leurs clients. « La plupart des recettes du Burida provient des maquis et bars du pays pour ne citer que ceux-là. Le paiement des impôts, des taxes communaux contribuent également au renforcement notre économie », fait remarquer Guy Hervé.
Marina Kouakou