La Côte d'Ivoire ne dispose d'aucune loi pour subventionner ces mamans solo.

Publié le 8 juin, 2020

A l’occasion de la célébration des mères, l’occasion est donnée de rendre hommage à toutes ces femmes qui se battent, seules, pour le bonheur de leur progéniture.

C’est à travers un smartphone haut de gamme que Anicet K. étudiant, remercie sa génitrice pour tous ses bienfaits, le 31 mai 2020, en prélude à la célébration de la fête des mères qui se tiendra le 7 juin 2020. « Mon fils m’a offert un jolie téléphone », se réjouit Christelle.  En général, cette mère qui a élevé seule ses enfants, a une façon unique de se célébrer avec les siens. Avec ses enfants, leurs amis et neveux, ils organisent une fête. « Le menu est fait par les enfants, ils économisent leurs argents de poche pour le cadeau, mais je m’offre moi-même un cadeau en leur nom », lâche Christelle, chef de cette famille monoparentale.

Comme Christelle, de plus en plus de femmes assurent l’éducation de leurs enfants, seules. Et plusieurs faits conduisent à cela. Le divorce, la séparation, le décès du père ou l’abandon du père. Selon une étude mentionnée sur la RTI, 85% des familles monoparentales sont gérées par les femmes contre 15% par des hommes.

Christelle joue à la fois le rôle du père et de la mère dans la vie de ses deux enfants dont une fille et un garçon. Elle s’en occupe si bien que les enfants se plaignent moins de l’absence paternelle. « Il faut leur expliquer la situation et surtout répondre à leurs interrogations pour les rassurer. En plus, ils sont libres de partir chez papa, de l’appeler au téléphone. Ils ne sont que les enfants de « parents séparés ». II est important, quelques soient les raisons de la séparation d’éviter de prendre les enfants en ‘‘otage’’ », conseille-t-elle.

Difficultés

Les femmes qui élèvent seules leurs enfants font face à plusieurs difficultés. La plus récurrente est la question financière. « Pour mon ainé, se souvient Christelle, je suis retournée à la maison familiale. Heureusement ma ‘‘place’’, la chambre réservée aux filles était encore disponible.  Je ne travaillais pas à l’époque. Sans moyens financiers ce n’est pas possible de s’occuper seule des enfants. Il faut les nourrir, les habiller, les soigner, les scolariser ». Pour son deuxième, une fille, c’était moins compliqué. Elle avait commencé à travailler. « La situation a été plus aisée, je travaillais, j’avais une assurance maladie, et j’avais mon propre domicile. C’est la meilleure situation pour une femme d’élever seule son enfant », raconte-t-elle.

Cette charge de paternité a longtemps été l’apanage des hommes. Et cela rendait difficile l’établissement des actes de naissance des enfants. Mais depuis quelques années, les choses ont changé et la loi permet aux enfants de porter également le nom de famille de leur mère. Cette nouvelle loi en Côte d’Ivoire vient résoudre la déclaration de naissance d’un enfant à l’état civil. « Il faut arrêter le cycle des enfants sans extrait de naissance parce que le père ne veut pas reconnaitre son enfant.  La deuxième, c’est que, les noms des pères qui n’ont que des filles sont préservés. Avec l’ancienne loi, les noms de famille de ces pères disparaissaient avec le mariage de leur fille. Les papas doivent être heureux et applaudir cette loi », pense-t-elle.

Cette loi a également l’avantage de permettre à la mère d’un enfant, si elle le désire, d’ajouter son nom à celui du père. Elle concerne aussi bien les enfants nés dans le mariage que les enfants naturels, c’est à dire ceux dont les pères et mères ne sont pas unis par les liens du mariage.

Elle semble être un soulagement pour les femmes monoparentales, car selon la juriste Rogatienne Degrou Boni, « L’enfant porte le seul nom de famille de sa mère et c’est la mère qui exerce l’autorité parentale sur l’enfant ».

 Toutefois, la juriste ajoute que la loi permet au père de reconnaître l’enfant et d’établir sa filiation plus tard. « Dans ce cas, le nom du père peut être ajouté à celui de la mère ou avec le consentement de la mère, le nom du père peut être écrit en première position avant celui de la mère sur l’acte de naissance de l’enfant ».

Regard de la société

Comme les enfants de Christelle, Seydou aurait aussi voulu faire plaisir à sa mère. Malheureusement, il ne pourra pas puisse qu’elle a quitté ce monde depuis des lustres. « Si elle était là aujourd’hui, je l’aurais honorée tant elle m’a tout donné », soutient Seydou qui a été éduqué par sa mère seule. Ce quinquagénaire se souvient que ses deux parents s’étaient séparés sous la pression de la famille de sa défunte mère. Il retient beaucoup de valeurs de cette éducation reçue par pratiquement sa seule mère. « Le sens du travail bien fait, j’ai appris à m’occuper des miens mes petites sœurs, et même à faire la cuisine. Je retiens surtout le sens de l’amitié », se rappelle-t-il. A l’époque où Seydou grandissait sous la coupole de sa maman, seule, les lois n’avaient pas encore changé et le regard de la société l’embarrassait souvent.  

Notre société a toujours eu des préjugés à l’endroit des femmes monoparentales. Notamment en ce qui concerne leur qualité d’éducatrice. Pour le sociologue, spécialiste de l’éducation Dr Vasséko Karamoko, « on n’a pas encore franchi totalement la barre des sociétés de la deuxième modernité. Nous sommes encore attachés à nos traditions ou le contrôle social est très dominant sur l’individu ». Et pour changer cette vision de nos sociétés, il invite les femmes à « faire entendre leur voix en union afin de faire intégrer officiellement cette forme de vie familiale comme critère dans nos sociétés ».

Pour l’heure, ses femmes sont résignées à se battre seules avec leurs enfants. Parce que la Côte d’Ivoire ne dispose d’aucune loi en vue de les subventionner. Cependant, le gouvernement a pris des dispositions, selon la Directrice de la Promotion de famille, Dr Honorée Konan Kouamé. « Au niveau du ministère de la femme, de la famille et de l’enfant, il y a des dispositions prises notamment la mise en place d’un fond et de programme, pour aider et soutenir ces femmes. Si on a l’opportunité d’avoir ses fonds à la disponibilité il ne faut pas hésiter. Nos portes sont ouvertes », a-t-elle déclarée sur les antennes de la télévision nationale. En attendant que les pouvoirs publics apportent un soutien plus important, ces braves mères méritent des hommages… au-delà de ceux qu’ils reçoivent en cette période de la part de leurs enfants biologiques.

MK

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