A Abengourou, la police a fermé le maquis qui a servi l'alcool aux enfants.

Publié le 17 août, 2020

La fermeture, le 2 août 2020 d’un maquis dans la ville d’Abengourou, pour avoir servi de l’alcool à des mineurs remet au goût du jour la question de l’alcoolisme chez les enfants. En effet, malgré l’interdictions d’accès à ces endroits aux mineurs, des responsables de maquis et bars n’hésitent pas à ouvrir leur porte à ces innocents.

Sans ce poste du samedi 1er août 2020 du forum Facebook « Abengourou JE T’aime », ce groupe de mineurs seraient certainement revenu dans ce ‘‘maquis’’, lever le coude. Mais les images choquantes de cette demi-douzaine de gamins dont l’âge est estimé autour de 10 ans ont suscité l’émoi sur la toile… Au point où, dès le lendemain, le dimanche 2 août, la Police s’est saisie de l’affaire et a procédé à la fermeture dudit maquis. Une procédure a immédiatement été ouverte contre les responsables de cet espace qui a accepté ces clients peu ordinaires. Le Préfet de Police de la ville d’Abengourou, le commissaire divisionnaire Touré Lanzéni est lui-même monté au créneau pour promettre des sanctions exemplaires aux tenanciers dudit maquis.

En Côte d’Ivoire, la loi portant Code des débits de boissons du 1er août 1964, en ses dispositions concernant la protection des mineurs contre l’alcoolisme, interdit de servir de l’alcool aux mineurs.

Pourtant, ces dispositions n’ont jamais respecté. En tout cas, les débits de boissons existent, même aux abords de certains établissements scolaires. Et il n’est pas rare de voir dans certaines villes, des mineurs, notamment des filles, travaillant dans ces bars, maquis et les boîtes de nuit. Des endroits où l’alcool coule à flot, et où ces mineurs servent et se servent à souhait.

Il n’y a pas de chiffres récents décrivant l’ampleur du phénomène. Mais une enquête sur l’alcoolisme réalisée en 2009, par le Programme national de lutte contre le tabagisme, l’alcoolisme, la toxicomanie et les autres addictions (PNLTA) dans plusieurs régions de la Côte d’Ivoire, donne froid dans le dos. Elle révèle que 70 % des élèves consomment l’alcool et, l’âge d’initiation se situait entre 12 et 16 ans.

Malgré la loi et autres textes, la consommation de boissons alcoolisées continue d’augmenter chez les élèves. A l’évidence, il existe une tolérance qui ne dit pas son nom dans l’application de cette loi. Cette tolérance ou ce laxisme dans la protection des enfants en ce qui concerne l’alcoolisme s’explique.

Le sociologue Jean Bosson, souligne en effet, l’importance du milieu familial dans l’initiation à la consommation d’alcool chez les enfants. « Il est important de s’intéresser aux conduites de consommation d’alcool chez nos enfants », prévient l’expert en gestion de conflits, s’adressant aux parents consommateurs d’alcool. A l’en croire, la cohabitation avec des parents qui consomment l’alcool et le fait d’avoir de l’argent de poche peuvent être des facteurs favorables à la fréquentation de maquis par les enfants.

« Il faut sensibiliser les parents à être plus stricte dans la surveillance de leurs enfants », conseille-t-il, non sans inviter les tenanciers de bars et maquis à refuser l’accès de leurs commerces aux enfants.

La plupart des structures et ONG impliquées dans la protection des enfants concèdent la faiblesse de leur action dans ce domaine de lutte contre l’alcoolisme des mineurs. « C’est la sensibilisation qui est plutôt mise en avant », explique Mamadou Doumbia, président du Réseau des Acteurs des Medias pour les Droits de l’Enfant-CI (RAMEDE-CI). « Nous faisons plus les dénonciations. Quand un cas nous est signalé, on a recours aux structures spécialisées, sous la tutelle de la Direction de la protection des enfants. Ce sont ces structures qui interviennent », explique Mamadou Doumbia.

Parallèlement à ces structures, des élus ont fait de la protection des enfants contre l’alcoolisme leur cheval de batail. En 2019, Assalé Tiémoko, maire de Tiassalé s’était engagé à lutter contre fléau dans sa commune. Lors d’une réunion avec les tenanciers de maquis, de bars et autres débits de boissons frelatées ou alcoolisées dans sa commune, l’édile avait prévenu de sévir contre ceux qui ne respectent pas la loi interdisant la vente de l’alcool aux mineurs. Il leur avait donné un délai de trois mois pour la sensibilisation. L’étape suivante devait être la répression. C’était une promesse de campagne de M. Assalé. « Contre vents et marées et malgré les menaces dont je suis l’objet, je tiendrai mes engagements de campagne », continue de jurer le maire de Tiassalé. En tout cas, il a instauré des sanctions pécuniaires allant de 300.000 F CFA à 1.5 million FCFA, et même la fermeture du débit de boisson et le retrait de l’autorisation d’ouvrir.

A Abengourou, c’est la police a pris les choses en main depuis que la toile s’est enflammée suite à la publication des images de ces petits garçons et filles autour d’une table garnie de bouteille de bière. La promptitude des hommes du commissaire divisionnaire Touré Inza a également été unanimement saluée. Une suite de l’enquête et la sanction exemplaire annoncée devront avertir tous ces tenanciers de bars et maquis qui n’ont d’yeux qui pour l’argent du client. Et non de la tête du client.

Ténin Bè Ousmane

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