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Ancien cadre sur Air Afrique et humoriste sur la chaîne de télévision ivoirienne, Bamba Bakary est devenu un célèbre acteur de cinéma.

Bamba Bakary est un acteur. Il est humoriste et animateur à la télévision nationale. En fait Bamba Bakary est le père de l’humour en Côte d’Ivoire. Bamba a une devise et il s’engouffre à l’intérieur de celle-ci. Pour lui, « la vie c’est une école. On apprend chaque jour de la vie ». Avant Bamba Bakary il n’y avait pas d’humoriste, il y avait des acteurs de théâtre, des comédiens. Il s’agit de Léonard Grogruhet, Bienvenu Neba, Sidiki Vakaba. Mais l’humour avec le stand up, le one-man show, Bamba Bakary l’a commencé en 1980.

Bamba Bakary est né le 16 novembre 1948 à Korhogo. Son père est de Touba et était docteur vétérinaire. Dans l’exercice de sa fonction, Bamba père, a été affecté à Korhogo dans les années 1930 où il rencontra celle qui allait donner naissance à ce grand humoriste. Bamba Bakary est né avec un don.

« C’est inné. Depuis tout petit j’ai toujours réussi à faire rire les gens avec une facilité déconcertante », se souvient Bamba Bakary. Mais dans les années 1960 à 1970, l’humour n’était pas connu véritablement. Au demeurant on vous traitait de clown de service, de bon à rien.

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« On ne savait pas que l’humour était un métier. Il a fallu que j’arrive en France pour mes études pour que je découvre l’humour comme métier. Les Coluche, Thierry Le Luron et bien d’autres, étaient de grosses stars qui vivaient de l’humour et étaient des milliardaires », explique Bamba Bakary. Rentré au pays après sa formation, Bamba Bakary a été embauché à Air Afrique.

Mais étant en Côte d’Ivoire, la télé n’était loin. « Un soir, lors d’une soirée avec des amis et il y a eu une coupure d’électricité. On était dans l’obscurité et comme cela mettait du temps, j’ai commencé à raconter des histoires pour entretenir mes amis à ma table. Et comme on riait beaucoup, les autres invités se sont joints à nous. Quand la lumière est revenue, je me suis aperçu que presque tous les invités étaient à notre table », se souvient Bamba Bakary.

Et c’est à cette soirée que Bamba Bakary fait la rencontre de Georges Taï Benson. Celui-ci l’invite dans son émission « Bonjour c’est Dimanche ». Cette émission devient par la suite « Benson reçoit ». C’était des émissions de divertissement qui avaient une très grande audience. Mais Bamba a fait beaucoup de résistance pour rejoindre Benson sur le plateau. Mais son seul passage à la télé fait tache d’huile.

 « Un jour j’étais à mon bureau et je reçois un coup de fil du directeur général de la Rti, Ben Soumahoro. A mon arrivée, il me montre un grand carton qui contenait plus d’une centaine de courriers de téléspectateurs qui me réclamaient à la télé. Il m’a demandé de travailler avec Georges Benson sur le projet et finalement j’ai intégré l’équipe de ‘’Benson reçoit’’. Plus tard, on m’a confié des émissions à animer en solo ». Bamba Bakary venait de prendre ainsi un long chemin de gloire. Bamba Bakary utilisait les week-ends pour faire de l’humour à la télévision nationale.

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Mais tout n’a pas été un fleuve tranquille. Bamba Bakary a osé imiter le Président Houphouët à la télévision. Pour cette grande faute, le père de l’humour ivoirien a été mis aux arrêts à deux reprises. Et c’est un ministre d’Houphouët qui l’avait fait arrêter. « Si chez vous les dioulas on ne respecte pas les chefs, chez nous les Akans on respecte les chefs. La prochaine fois que je te vois à la télé en train d’imiter le président, je te fais arrêter et on te mettra en prison pour le reste de ta vie », lui a expliqué le membre du gouvernement.

Cela fait réfléchir. Bamba a eu peur mais n’a pas pour autant arrêté d’imiter le président. « Je n’attribue pas des propos au président. Je recopie ses discours, je les mémorise et ce sont ses propos que je répète dans mes spectacles. Donc j’ai estimé que je ne faisais rien de mal surtout que le président ne s’en plaignait pas », se réconforte Bamba Bakary dans son combat contre le ministre.

Pour la deuxième fois Bamba se fait arrêter par le ministre. Cette fois-ci l’humoriste prend son courage à deux mains et parle au ministre. « Monsieur le ministre, je ne comprends pas. Moi je bois le whisky et c’est vous qui êtes saoul. Il m’a traité d’impoli. Je lui dis que c’est Houphouët que j’imite et il ne s’en plaint pas ».

Bamba Bakary a été traqué, menacé. Bamba Bakary a été mis aux arrêts deux fois au moins parce qu’on a estimé qu’il se moque du président Houphouët en l’imitant. Bamba est un monument de l’humour en Côte d’Ivoire. Bamba a risqué sa vie pour installer l’humour en Côte d’Ivoire et le résultat est visible de nos jours.

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Le succès de Bamba Bakary en tant qu’humoriste est une réalité. Mais c’est le fruit d’un travail acharné. « C’est en France que j’ai découvert que l’humour était un métier et quand je suis rentré au pays, j’ai décidé de le prendre au sérieux, à mieux élaborer, structurer et organiser mes idées par l’écriture ». C’est le secret de Bamba Bakary.

« Je demande aux jeunes de travailler, de travailler. N’allez pas prendre des histoires sur internet pour les raconter en spectacle. Ecrivez vous-même vos histoires. Quand on écrit soi-même son histoire, on la rend mieux. On est là pour procurer du bonheur donc il faut que les jeunes travaillent beaucoup. Evitez le problème politique, le problème ethnique et le problème religieux », conseille le dinosaure de l’humour ivoirien.

Variétoscope, Tempo, Apatam, Tonnerre, Le bon vieux temps, Bonne cuisine. En parlant d’émission télé. Bal poussière, Sixième doigt, Les Partenaires, Les Étrangers, Une femme pas comme les autres, Assinie, Dr Boris, Coup de force, Les nouvelles aventures de Moussa le taximan, Les aventures de Moussa le taximan, Joli cœur. Bamba Bakary est un acteur qui a reçu beaucoup d’honneur et de distinctions. Bamba est très reconnaissant. « Ma vie artistique je la dois à Georges Benson. Et ma vie cinématographique je la dois à Henri Duparc ».

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« J’étais en déplacement au Sénégal. Le matin, je me réveille et je constate que je n’avais pas de lame rasoir dans ma valise. Je sors de l’hôtel pour me rendre chez le boutiquier d’à côté, un Mauritanien. Il y a un rang, je me mets dans la ligne pour attendre mon tour. A notre grande surprise, un Sénégalais costaud et grand de taille, sans tenir compte du rang, va directement à la caisse du boutiquier. Lorsque nous avons protesté, il nous a envoyé balader, prétendant qu’il est chez lui et qu’il avait le droit de faire ce qu’il voulait (dans un accent sénégalais).
Nous l’observions. Il demande au boutiquier de lui servir du tabac de pipe. Le boutiquier (dans un accent mauritanien) lui répond oui, mais précise qu’il y a trois catégories : faible, moyen et fort. Qu’à cela ne tienne, je vais tester les trois, rétorque le Sénégalais. Le boutiquier lui tend le faible. Il le passe sous le nez pour mieux sentir l’intensité de l’arôme ; Il s’ensuit un éternuement et le dépose. Il prend le moyen, s’en suit là une série de toux et le dépose. Enfin, il prend le fort et là, on attend un gros pet du fond du boubou du Sénégalais. Il dépose le tabac et demande au boutiquier s’il n’y a pas un plus fort. Réaction immédiate du Mauritanien : « Aiii patron, tu as pris faible tu as fait ‘’Atchuuue’’ (éternuer), tu as pris moyen tu as fait ‘’Kôssô kôssô kôssô’’ (tousser), tu as pris fort tu as fait ‘’Pouuum’’ (gros pet). Même si y a plus fort je te vendi pas ; parce que si je te vendi, tu vas cabinet dans mon boutique ici ».

C’est la première histoire de Bamba Bakary racontée en mars 1980 à la télévision ivoirienne. Et c’est elle qui a lancé véritablement sa carrière.

Sékongo Naoua

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