Pasteur, faux pasteur ou humouriste, Deperpignan est devenu une véritable star de l’humour ivoirien.
Fulbert Kouassi Yoman. C’est son nom à l’état civil. Vrai Baoulé, Fulbert Kouassi est convaincu que « les baoulés sont les ancêtres des Français ». Est-ce que cela à quelque chose à avoir avec le choix de son nom de scène ? En fait « Deperpignan » fait penser à Perpignan, la capitale du Roussillon, dans l’Hexagone. Kouassi est formel : « Les ancêtres des Français sont les Gaulois, et c’est le gaulois, selon moi, que les baoulés appellent Goli (masque baoulé) ». Est-ce qu’il faut le croire ? Mais « Deperpignan » est sûr de sa chose et pense qu’il a franchi une autre marche. « Ce que je dis ne vient pas de moi. Ça vient de là-haut », aime-t-il dire. D’où lui vient ce don de faire des gags ? Parce que « Deperpignan » ne considère pas ce qu’il fait comme un boulot. Il définit ainsi la différence entre le travail et le boulot. « « Le travail c’est ce qui te suit et le boulot c’est la tâche », affirme le comédien. En réalité Fulbert Kouassi Yoman alias Deperpignan est né avec çà.
Fulbert Kouassi est issu d’une famille modeste. De Dimbokro, le jeune homme se retrouve à Abidjan, dans la commune de Marcory. « On ne peut rien changer de son destin », dit-on. C’est vrai et çà se vérifie dans le cas de Deperpignan. Chez lui tout est naturel. On a l’impression qu’il ne fait aucun effort pour sortir des gags. « Je ne sais pas ce que je vais faire. Je me fais sérieux et cela cause problème. Je me fais bête et on m’abat », affirme Deperpignan.
En fait chez Deperpignan c’est inné. Dans sa famille il y a des comiques. Au quartier il raconte des blagues pour faire rire. « Mais le plus drôle c’est que quand je suis sérieux on rit, et même quand je suis comique on rit. Je me rappelle. Quand j’ai perdu mon oncle et je me suis mis à pleurer sur le lieu des obsèques, mes cousins m’ont soulevé pour me mettre dans l’arrière cours parce que mon visage faisait rire aux gens », se souvient-il.
Vu ce qu’il réussissait, les proches lui conseillent de s’inscrire au théâtre. A Marcory où il vit, il rejoint la troupe théâtrale « Ephata » de l’église catholique sainte Thérèse de Marcory. Il est un fidèle de cette Eglise. Et la lumière éclata.
« Un jour Le Magnific m’informe qu’il y avait une émission de Didier Bléou et m’a demandé de tenter ma chance (en 2012 et 2013). J’ai gagné deux éditions successives et je fais la connaissance Mamane par la suite. Tout est parti de là. C’est par là que j’ai su que l’humour est un métier à part entière », se souvient le comédien. Deperpignan se distingue par deux styles : Le Baoulé et le pasteur. « J’ai commencé par le style baoulé parce que je maîtrise bien mon ethnie. Je sais comment le Baoulé est et c’était une source d’inspiration pour moi », explique l’originaire de Dimbokro. Le comédien a continué de travailler pour être performant à tous les spectacles.
C’est ainsi qu’il a été inspiré par un film. « Bébé police ». « Il s’agit d’un homme qui vit dans la misère. Un jour passant à côté d’une église il se dit qu’il pouvait devenir un homme de Dieu. Cet homme crée une église et commence à prêcher. Mais quand la supercherie a été découverte il a fui et est devenu policier. Mais j’ai surtout été inspiré par son rôle de pasteur », se souvient Deperpignan. Le comédien a donc travaillé l’image du faux pasteur. Deperpignan est convaincu qu’autant il y a de faux pasteurs autant il y a de faux fidèles.
Deperpignan est unique dans son genre. Dans son église on ne s’assois pas n’importe où. « Devant le pasteur il y a les pauvres. Heureux les pauvres le royaume des cieux leur appartient. Au milieu se trouve les chômeurs parce qu’ils ne sont pas encore pauvres. A ma gauche se trouvent les malades ». Sacré Deperpignan. Il se permet même d’instruire les gens. « Les gens font des erreurs dans leurs manière de parler. Connaître quelqu’un par exemple veut dire que vous avez des rapports. Rappelez-vous cette phrase : Marie ne connut point d’homme. Il faut plutôt dire que je l’ai vu ou je l’ai côtoyé ». C’est du Deperpignan bien servi. Mais le comédien a la tête sur ses épaules. « En tant que chrétien je sais où m’arrêter pour ne pas arriver au blasphème. Les spectateurs aiment quand je fais le faux pasteur avec une mimique, de la gestuelle et des fausses paroles de connaissances car ce sont des réalités vécues par beaucoup de personnes », rassure-t-il.
Pasteur, faux pasteur ou comédien, Deperpignan régale.
Sékongo Naoua