La mangue est une des cultures phares dans le nord du pays. La filière mangue n’a pas de secret pour lui. Il s’agit de Soro Yeyezoulou, responsable de l’usine Sofa Corporation. C’est une usine de traitement de mangues. Dans cette interview il nous instruit sur la campagne de la mangue.
Est-ce que la mangue nourrit son homme ?
Oui la mangue nourrit son homme quand elle est bien traitée, quand le travail est bien fait.
Qu’entendez-vous par bien traité ?
En toute chose il faut la formation. Chaque activité a quand même un cahier de charge. C’est en suivant les consignes du cahier de charge qu’on fait du bon travail.
Combien de variétés de mangues avons-nous en Côte d’Ivoire.
Il y a plusieurs types de mangues. Je ne saurai les citer.
Est-ce que toutes les variétés sont vendables sur le marché international ?
Non. Aujourd’hui c’est beaucoup plus la mangue de couleur qui est demandée sur le marché européen. Précisément la mangue Kent. Mais il y a aussi la Kéitt et l’Amélie. Mais la variété la plus vendue est la Kent.
Comment une mangue se retrouve-t-elle sur le marché international ?
Il faut déjà attendre le bon moment pour la récolte. Il ne faut pas la cueillir en état d’immature. Après la cueillette la mangue est acheminée vers les usines de conditionnement où elle est traitée avant d’être mise sur le marché international.
Est-ce qu’il y a une période spécifique dans l’année pour la récolte ?
A partir de la floraison on peut situer la période de la cueillette. Après la floraison il faut compter entre 90 et 120 jours pour que la mangue arrive à maturité.
Qui fixe le début de la campagne ? Est-ce la tutelle ou les acteurs que vous êtes ?
C’est l’Inter-mangue qui fixe la date de la campagne. Avant ce sont les encadreurs qui le faisaient mais depuis la création de l’Inter-mangue c’est elle qui fixe la date.
Qu’entendez-vous par Inter-mangue ?
Inter-mangue c’est l’association des acteurs du paysage de la production et de la commercialisation de la mangue en Côte d’Ivoire.
En quoi consiste le traitement de la mangue dans les usines de conditionnement ?
Pour accéder au marché européen il y a un cahier de charge. Le client fixe les conditions qu’il veut que la mangue remplisse. Traiter la mangue c’est d’abord le tri. Il ne faut pas que la mangue soit blessée, il ne faut pas qu’on voit des taches sur la mangue. Voilà quelque unes des conditions fixées. Il faut que la mangue qui se retrouve sur le marché international soit compétitive face à la concurrence. Donc traiter la mangue c’est le tri et le conditionnement.
Comment se comporte la mangue ivoirienne sur le marché ?
La mangue ivoirienne est la meilleure. Elle est bio et elle est plus demandée que celle du Brésil et du Pérou.
Est-il facile de vendre sur le marché européen ?
Comme je l’ai dit tout dépend du cahier de charge. Quand la mangue répond aux conditions du cahier de charge elle se vend.
Pour la vente à l’international avez-vous un intermédiaire ?
Nous avons un intermédiaire qui est Vidalkaha. Il est installé ici en Côte d’Ivoire précisément à Sinematiali. C’est lui qui est en contact avec le client à l’extérieur et qui reçoit le cahier de charge de celui-ci. En fonction des conditions posées par le client nous traitons la mangue.
Combien de mois dure la campagne de mangue ?
Avec le changement climatique elle dure entre un et un mois et demi. Sinon la campagne durait trois mois.
On constate qu’il y a de moins en moins de verger de la mangue qu’on appelle greffe.
C’est l’Amélie. Le changement climatique a fait que l’Amélie arrive à maturité au même moment que la Kent. Or sur le marché international c’est les mangues de couleur qui sont vendent plus. L’Amélie est ce qu’on appelle une mangue verte. Il est difficile d’avoir des clients pour elle si la Kent est là. L’Amélie arrivait à maturité un mois avant la Kent donc on pouvait la mettre sur le marché avant la Kent. En ce moment la campagne durait plus de deux mois. Ce n’est plus le cas de nos jours.
Donc vous ne commercialisez pas l’Amélie.
Non. Je ne commercialise plus l’Amélie. Même en mangue séchée les gens préfèrent la Kent à cause de son parfum. La Kent est plus rentable que l’Amélie. C’est le même problème que la mangue qu’on appelle la Keitt. Cette dernière a la particularité d’être dure. Avant la campagne commençait par l’Amélie, ensuite la Kent et on terminait par la Keitt. On pouvait facilement faire trois mois de campagne. Mais le changement climatique et les exigences sur le marché ont fait que la campagne se résume seulement à la Kent.
Existent-ils des coopératives pour les producteurs ?
Oui, mais le producteur n’est pas obligé d’adhérer à une coopérative. C’est vrai qu’il y a des avantages à adhérer à une coopérative mais ce n’est pas obligé. Dans mon cas, tous ceux qui me livrent en mangue ne sont pas dans des coopératives. Je travaille avec des particuliers.
Quels sont les différents acteurs dans la chaîne de commercialisation de la mangue ?
Entre le paysan et nous il y a l’encadreur ou l’intermédiaire. Il y a deux types de statut pour l’encadreur. Il peut être un employé. En ce moment il est pris en charge chez nous et joue un rôle d’intermédiaire entre le producteur et nous. Il va sur le terrain et ramène les mangues des vergers. Il peut aussi être libéral. En ce moment il achète les mangues mises dans les caisses chez le paysan et nous les revend au kilogramme. A notre tour nous envoyons la mangue à celui qui la négocie sur le marché international. Dans mon cas c’est Vidalkaha. On a donc trois acteurs. L’encadreur, nous et celui qui évacue la mangue sur l’Europe.
Quel est le prix d’achat de la mangue ?
Cette année la caisse était à 2300 Fcfa. C’est le prix bord champ. L’encadreur libéral ou pisteur achète la caisse avec le paysan à 2300 Fcfa et nous vend les mangues à 200 francs le kilogramme. Mais chez nous, on ne paye que les mangues qui remplissent nos conditions. On procède donc à un tri.
Le tri est une étape importante pour vous exportateurs ?
Le marché européen est exigeant. En fonction des conditions posées à l’ouverture de la campagne nous travaillons en conséquence. Le pisteur tri au niveau du verger. Arrivé à l’unité de conditionnement il y a une autre phase de tri. C’est pour avoir une mangue compétitive sur le marché.
Après toutes ces étapes de tri est-ce que la mangue peut encore être rejetée ?
L’Etat de Côte d’Ivoire nous affecte des agents phytosanitaires. Ils sont les intermédiaires entre nous et le marché international au compte de l’Etat. Tout ce qui entre ou sort dans le cadre du commerce doit être contrôlé. De plus si la mangue arrive à franchir cette étape les agents phyto des pays d’Europe feront aussi leur travail au compte de leurs pays. A toutes ces étapes la mangue peut être rejetée.
D’où vient la mangue qui est sur le marché local ? Abidjan par exemple.
C’est toute mangue qui n’arrive pas à compétir à l’international. Ce sont les mêmes mangues que nous utilisons pour en faire la mangue séchée.
On parle de fuite de la mangue vers les pays voisins.
C’est une réalité. Mais c’est de moins en moins fréquent de nos jours.
Est-ce qu’il arrive que vous vous approvisionniez aussi dans les autres pays pour alimenter vos usines ?
Il fut un moment où on allait chercher la mangue au Mali mais depuis un certain temps on ne le fait plus. La raison c’est que les pays de la sous-région ont la même période de campagne de mangue que nous. De plus la mangue de Côte d’Ivoire est la meilleure de toutes.
Réalisé par Sékongo Naoua