Ph: VVDF/Sekongo

Il est calligraphe. Il est à Sinematiali. Il n’a pas fait de grandes études. Mais quel talent ! Voiedefemme.net est allé à la rencontre de Silué Nalougo.

Sinematiali, la ville chère à Hyacinthe Sarassoro, est comme toutes les autres communes de l’intérieur. Le matin chacun court pour son activité. Et là en plein site du marché, un magasin. Rien de l’extérieur ne montre ce qui se fait là-bas. Mais en observant de près on constate des jets de peinture, des taches de peintures çà et là. A l’intérieur, tout un bazar. Seul le propriétaire des lieux peut s’y retrouver. Des petits pots de peintures, des pinceaux, des anciens pots de peinture, une règle digne d’un écolier de cours préparatoire, une table sur laquelle tout semble en désordre. Le genre de coin où en y rentrant on est porté par cette envie de nettoyer. Sur la gauche une autre table sur laquelle se trouve un petit ventilateur, genre jouet, et un poste radio. La poussière (on est en plein mois de décembre) par-ci et par-là fait qu’on distingue difficilement les éléments sur cette table. Mais le son du balafon vous accueille et vous donne l’envi d’esquisser quelques pas de danse. Bien sûr pour les connaisseurs.

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Dans tout ce décor, il est là. En chemisette, Silué Nalougo est à la tâche. C’est le propriétaire des lieux. Mais attention. Dans tout Sinematiali et environs il est plus connu sous le nom de « Fils ». « J’étais très petit si bien que les gens ont commencé par m’appeler Fils. Je tiens ce nom depuis mon enfance », nous explique le calligraphe. Nalougo est un homme occupé. Entre travail et engagement familial il est toujours parti. Chance pour nous. Il est là, à la tâche avec son matériel rudimentaire. « Fils » est sorti du système scolaire en classe de 4ème.

Silué a appris son métier sur le tas. « J’étais avec mon grand frère, Siriki, à Katiola. Il était professeur d’art plastique. Je ne comprenais pas et je n’aimais pas les dessins qu’il faisait à la maison. Or, il voulait que je sois à côté de lui pour lui donner le matériel dont il a besoin au moment voulu. Il faisait l’abstrait (Art abstrait) et je ne comprenais rien dans ces figures bizarres », se souvient le calligraphe. Il ne savait pas que cela allait devenir son gagne-pain. « Bizarrement les gens aimaient ses calligraphies, mais moi je ne voyais pas en quoi ces dessins avaient un intérêt », a poursuivi Nalougo.

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Mais Silué avait quelque chose en lui, quelque chose qui l’accrochait. « J’aimais faire les figuratifs, reproduire une image. Reproduire quelque chose en la regardant. Or mon grand frère faisait des toiles uniques. Il travaillait beaucoup avec la nature », se souvient-il.

De Katiola, le futur calligraphe se retrouve à Sinematiali avec l’autre grand frère. Ce dernier aussi faisait les banderoles, les images sur les habits traditionnels, les t-shirts de sport, les murs et les magasins. Un don dans la famille. « Je n’aimais pas peintre. Mais j’ai remarqué que quand je faisais une toile les gens l’appréciaient mais moi je n’aimais pas le faire », affirme Nalougo. « Ce sont les filles qui m’ont poussé à faire la calligraphie. En fait quand on donnait une image à reproduire aux élèves dans le cours d’art plastique, les filles venaient me solliciter moyennant quelque jetons », se confesse Silué.

Naturellement le professeur s’est vite rendu compte que les images n’étaient pas le fruit du travail de ses élèves et convoque Nalougo à l’école. En fait le professeur se retrouvait avec la même image chez les filles. « Le professeur m’a demandé si j’avais fait de l’art plastique. Il a trouvé que j’avais du talent et il a voulu qu’on ouvre un magasin pour la calligraphie. Mais il y a eu la crise de 2002 et il est parti sans qu’on ait l’occasion de réaliser le projet », affirme « Fils ».

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Nalougo n’a pas fait des études en art plastique, mais « Fils » est un génie. Et il partage sa connaissance. Des élèves viennent s’inspirer de sa dextérité et de son inspiration. A la tâche, « Fils » est inspirant. Mais le calligraphe manque cruellement d’équipement pour s’exprimer. « Mon ambition est de pouvoir avoir le matériel adéquat pour travailler. C’est du matériel qui coûte cher et j’espère pouvoir en avoir un jour », affirme « Fils » avec l’air confiant.

En réalité il y a trop de possibilité dans cette cité d’où est originaire plusieurs cadres qui occupent de hautes responsabilités au sommet de l’Etat. « Fils » est fils de Sinematiali. « Fils » a de l’ambition. « Fils » est un espoir d’investissement. « Fils » a besoin de s’exprimer pour la grande joie de la population.

Sékongo Naoua

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