A la tête du Centre ivoirien antipollution (CIAPOL), Dr Martin Dibi Niagne a plusieurs fois été distingué pour son action en faveur de la protection de l’environnement. Nous vous proposons la deuxième partie de cette interview exclusive avec le patron de cette institution. La troisième et dernière partie sera diffusée dans notre prochaine édition.

Quel est l’état de pollution concrète de cette lagune aujourd’hui. Peut-on pour autant conclure que son état s’est amélioré ?

Si aujourd’hui si vous ne sentez plus d’odeur comme par le passé, c’est parce que les gens travaillent. C’est le résultat de tous les chantiers que vous voyez sur la baie. Mais cela ne veut pas dire que la lagune n’est pas polluée. Elle est polluée. Par exemple, je ne conseille pas de se baigner dans la lagune, de boire l’eau de la lagune.

Et le poisson ?

Je ne recommande pas non plus la consommation du poisson de lagune. D’ailleurs vous n’y trouvez pas de gros poissons. Ce sont des poissons nains éprouvés par la pollution qu’ils subissent.

Est-ce qu’un jour ce milieu pourra être véritablement assaini ?

C’est à cela qu’on veut venir. On a fait une étude, par l’intermédiaire d’un cabinet français. L’Etude de faisabilité de la dépollution de l’ensemble des baies lagunaires d’Abidjan. Cette étude a montré que l’ensemble des baies est pollué. Mais chaque baie a sa caractéristique. Mais il y a une qui est commune à l’ensemble des baies : les macrodéchets (sachets plastiques, bois, chiffons).

Comme c’est le point commun de toutes les baies, on a sollicité la coopération française. On a approfondi l’étude pour définir le dispositif de cette collecte et de gestion de ces déchets.  Dans la collecte, les engins ont été définis, le mécanisme pour le traitement a été précisé et qui devrait permettre la production d’hydrocarbures, de l’électricité et la production d’ustensiles de ménage, telle que les cuvettes, des sceau… La mise en œuvre de ce projet devrait créer des emplois. Cette étude est là. On cherche maintenant des financements pour réaliser ce dispositif. Une fois que ce sera fait, on va arriver à l’état d’assainissement dont vous parlez.

Une table ronde des bailleurs était prévue depuis juin 2020. A cause de la Covid-19, la table ronde n’a pu se tenir. On espère que ce sera fait. Nous au CIAPOL, nous y tenons.

Il y a aussi la gestion des déchets sur le continent. Comment cela se gère maintenant après la fermeture cde la décharge d’Akouédo ?

La décharge d’Akouédo devrait être fermée depuis 10 ans. Et chaque fois le gouvernement négociait avec les populations. Parce que la capacité d’absorption des déchets sur ce site était dépassée.

Depuis 2017, la décharge a été déplacée à la nouvelle décharge de Kossihouen, située à 44 km d’Abidjan. Cette nouvelle décharge est bien contrôlée. Et d’Akouédo est en train d’être aménagée pour être attribuée pour construire des logements. 

Il y a également les Lacs artificielles de Yamoussoukro qui ne sont plus suffisamment entretenus…

Il y a moins d’un mois, notre ministre de tutelle, le ministre de l’Environnement et du développement durable, nous a instruit de voir comment on doit nettoyer ces lacs. Nous avons fait une étude, on a évalué le coût pour nettoyer les 11 lacs de Yamoussoukro. Les coûts et engins qu’il faut ont été soumis au gouvernement.

Il faut faire une gestion intégrée de ces lacs. Nous sommes en train de réaliser un projet pour comprendre pourquoi les eaux usées de Yamoussoukro sont déversées dans le lacs.

Donc il ne s’agit pas seulement de nettoyer. Il faut faire un type de projet de gestion intégré. Par exemple, si je veux aujourd’hui enlever les végétaux qui sont sur les lacs, il faut que je détermine l’origine de ces pollutions. Donc nous sommes en train d’élaborer un projet pour prendre en compte toute la chaine. Comment les eaux usées de la ville se retrouvent dans les lacs et voir quelles sont les parties prenantes impliquées dans la gestion de ces lacs. Le district, la mairie, les communautés… Nous sommes en train de faire le TDR pour qu’on réunisse toutes les parties pour comprendre et pour que chacun puisse prendre ses responsabilités.

 Il y a quelques années, le CIAPOL est allé enlever toutes les pollutions. Mais un an après, c’est revenu. Donc nous voulons maintenant aller plus loin. En identifiant l’origine des problèmes…. Nous espérons qu’à la fin des bailleurs puissent nous assister dans la mise en œuvre de la gestion intégrée.  Nous voulons nous attaquer à la source, venir tout nettoyer et faire un suivi.

Quand est-ce que ce projet sera mis à exécution ?

Je ne peux pas vous dire un délai. Mais le gouvernement est conscient que les lacs de Yamoussoukro doivent être assainis. Si le gouvernement nous a instruit à engager le projet, cela signifie que l’Etat a pris en charge la question et ça ne saura tarder.

Quelle est la situation de la qualité de l’air en Côte d’Ivoire ?

Ne confondez pas ce que les opérateurs dégagent comme polluant dans l’air et l’air que nous respirons. Compte tenu des condition météorologiques, l’air est brassé. Nous n’avons pas encore fait une campagne de mesure pour évaluer la bonne ou mauvaise qualité de l’air que nous respirons. Mais ce que je puis dire, étant donné que notre air à Abidjan est brassé, je ne pense pas qu’il y’ait une pollution aussi importante. C’est généralement dans les pays industriels que nous voyons ce type de pollutions caractérisé par des brouillards des Smock atmosphérique.

Il faut dire que les conditions météorologiques jouent également pour nous. C’est vrai que des industriels en Côte d’Ivoire contribuent par leurs activités à émettre des polluants, mais grâce aux bonnes conditions météorologiques, les populations d’Abidjan respirent du bon air.

Pouvez-vous expliquez un peu ces conditions météorologiques ?

On en entre autres la forêt du Banco qui joue un grand rôle. C’est pour cela que nous sensibilisons contre la destruction de cette forêt. 

Et le sol ?

Nous n’avons pas encore attaqué ce domaine. Il faut reconnaître que le CIAPOL, a des difficultés depuis la crise postélectorale de 2010-2011. Nous n’avons pas de laboratoire. On est obligé de sous-traiter pour nos analyses.

Le sol, c’est un milieu comme les eaux et l’air. A la différence des autres, le traitement du sol demande d’autre analyses et d’autres appareils. Mais ce programme concernant le sol n’a pas encore été abordé par le CIAPOL. Cependant, je puis vous rassurer que le sol n’est pas aussi dégradé. Sauf que ce sont les plantations industrielles qui utilisent des produits phytosanitaires.

Ténin Bè Ousmane

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