En Côte d'Ivoire, selon l'UNICEF, 33 bébés décèdent sur 1 000 naissances vivantes, au-delà de 28 jours de vie.

En Côte d’Ivoire, faute de couveuses en nombre suffisantes dans les centres de santé, de nombreux enfants nés avant terme voient leurs chances de survie très minces.

Dame Aimée B., la trentaine, se souvient encore, avec amertume, de cette mauvaise expérience. Ce jour-là, une semaine après son accouchement à la maternité d’Attécoubé, et l’évacuation du bébé au CHU d’Angré, les médecins lui annonçaient le décès du nourrisson. C’était une fille ! « C’est au CHU de Cocody que nous sommes d’abord venus. Là, on nous a dit qu’il n’y avait pas suffisamment de couveuses ce jour-là. Il fallait trouver une clinique où on devait payer plus cher. Mais nous avons eu la chance d‘avoir une couveuse au CHU d‘Angré. Elle coutait 10.000 F CFA par jour, sans les frais de traitements pour l’enfant », se souvient-elle.

Dr Christophe MIEZOU médecin gynécologue obstétricien spécialiste en assistance médicale a la procréation.

Après avoir accouché à sept mois, le bébé prématuré était malade et il devait être nourrit à la sonde. « Elle était branchée à un tube de respiration. Il y avait les sondes, des seringues… qu’il fallait changer aussi régulièrement », raconte cette mère de trois enfants…. Mais ces efforts n’ont pu sauver la vie au nourrisson…

En Côte d’Ivoire, la mortalité néonatale est une calamité. Sur 1 000 naissances vivantes, au-delà de 28 jours de vie, 33 bébés décèdent, selon l’UNICEF. Et à l’échelle de l’Afrique subsaharienne, ce taux est de 27 pour 1 000. La première cause de ce mauvais chiffre est la prématurité.

Les causes de ce triste tableau sont multiples, selon le docteur Christophe Miézou, gynécologue obstétricien. Ce spécialiste en en assistance médicale à la procréation, a révélé à VoixVoie De Femme quelques pistes. Non sans réserve.« Les causes des accouchements prématurés ont, à environ 60%, des causes qui ne sont pas connues », fait-il remarquer. Avant de citer les « différents groupes de causes d‘origines maternelle, infectieuse, obstétricaux ou ovulaires ».

« Concernant les causes d‘origine maternelle, il y a l’âge de la mère. Les patientes qui ont un âge inférieur à 18 ans ou des patientes qui ont un âge supérieur à 35 ans sont sujettes à la prématurité.  Il y a aussi le tabagisme, l’abus d‘alcool et la consommation des produits toxines, qui conduisent à un bas niveau à l’anémie », explique le spécialiste. Qui ajoute que les traumatismes abdominaux, notamment les saignements entre le deuxième ou et le troisième trimestre d’une grossesse, les travaux pénibles ou les grossesses rapprochées peuvent être à l’origine de la prématurité. 

Le Dr Miézou cite également des causes d’ordre psychologique. Notamment pour les femmes qui ont de nombreux enfants à bas âge en charge. Parlant des causes infectieuses, le praticien cite les infections urinaire ou vaginale. « Il y a ce qu‘on appelle des cauris amniotiques, il y a aussi des fièvres qui sont à l’origine de toutes ces menaces », prévient-t-il.

En développant les causes obstétricales, le gynécologue explique qu’elles concernent les femmes qui ont déjà fait ou des accouchements prématurés, ou des avortements tardifs ou des femmes qui ont une ‘‘béance’’ du col de l’utérus, c’est à dire celle dont le col est déjà ouvert et connaît des malformations utérines.

En ce qui concerne les causes ovulaires, Dr Miézou les lie aux ‘‘grossesses multiples’’. Notamment les jumeaux, des triplés…

Pour l’obstétricien, il est bien possible de sauver les bébés prématurés. Selon lui, c’est souvent l’absence de couveuses et les retards dans les prises en charges de nourrissons qui sont souvent fatales. « Il y a le temps mis pour le transfert d’un bédé né prématuré. Il faut également tenir compte du temps pour le personnel soignant de trouver un centre de soins au plateau technique capable de recevoir le bébé », fait observer le gynécologue. Qui insiste sur l’insuffisance de couveuses dans les centres de santé et surtout dans le monde rural. « L’offre devrait être supérieur à la demande. Malheureusement, les structures sont très rapidement saturés et du coup, les patientes se rabattent sur celles des villes et banlieues comme Dabou ou Anyama pour pourvoir transférer les prématurés », regrette-t-il.

La méthode « mère Kangourou » sauve des dizaines d’enfants au CHU de Treichville.

Quelle solution de prise en charge

Pour parer à l’insuffisance des couveuses, l’on a recours à la méthode « mère Kangourou », au CHR de Treichville, depuis mars 2019. Cette méthode est inspirée de l’animal australien et développée par des pédiatres à la fin des années 1970, en Colombie, pour pallier le manque de couveuses et lutter contre la transmission des infections néonatales. Le nourrisson est placé contre la poitrine de sa mère (plus rarement du père), dans une configuration « peau-à-peau », de manière permanente ou par intermittence, afin de créer des conditions idéales de température, d’affection et de repos. Tout ce dont le grand prématuré a besoin pour survivre.

C’est en 2018 que, sur recommandation du chef de service de pédiatrie médicale du CHU de Treichville et avec l’appui financier de l’UNICEF, la docteure Somé-Meazieu et trois autres praticiens sont allés se former à la méthode mère kangourou en Afrique du Sud. A leur retour, ils ont mis en pratique leur apprentissage au sein des deux premiers centres SMK de Côte d’Ivoire, à Treichville et Korhogo, et ont rapidement formé d’autres collègues à cette méthode salvatrice… Le centre de soins ‘‘mère kangourou’’ de l’hôpital de Treichville est entièrement réhabilité et équipé par l’UNICEF avec l’aide du gouvernement Français, à travers le fonds français Muskoka.

Ténin Bè Ousmane et Békanty N’Ko ( stagiaire)

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