Le célèbre peintre Traoré Adama dit Adamo, était l’un des exposants rencontré à Djaka festival (évènement culturel qui rassemble depuis plus de huit ans les enfants de la région du Lôh-Djiboua, sous un thème annuel), le samedi 14 août 2021. Dans cette interview qu’il a accordé à Voix Voie de Femme, l’handicapé moteur aux pinceaux « magiques » spécialisé dans les paysages et portraits, avec plus de 20 années d’expériences et qui a bénéficié de soutiens financiers de plusieurs personnalités publiques, notamment l’actuel président de la république de Côte d’Ivoire Alassane Ouattara, revient sur son parcours, ses réalisations, ainsi que ses projets.

Vous avez plus de 20 années d’expériences à ce jour. Dites-nous comment avez-vous appris l’art que vous pratiquez aujourd’hui?


Je fais de la peinture depuis l’âge de 9 ans aujourd’hui j’ai plus de 40 ans. Je l’ai appris dans la commune d’Abobo quartier « BC ». Il y avait dans cet endroit un centre pour les handicapés. Nous étions plus de 1000 personnes handicapées dans ce centre. Là-bas, nous avons fait la connaissance d’une femme blanche qui se prénommait Marie Rose Odile. Elle nous a formé comme il se doit. Ce qui était plus favorable pour moi c’était la peinture, les dessins, les tableaux. Je l’ai fait avec tout mon cœur et je ne le regrette pas. La formation a duré plus de 15 années. Cette dame ne vit plus aujourd’hui, mais je lui dois tout. Elle est décédée en 2002. J’ai été au dans la rue, A Abobo, au deux plateaux…


Comment s’est faite votre installation?


C’était très dur. Je m’asseyais à Abobo à la marie, certains passants me jetaient de l’argent, d’autres m’insultaient, crachaient sur mois… J’ai vécu beaucoup de choses, mais il y a un temps pour tout. Aujourd’hui cela est bien derrière moi. J’ai commencé à faire les cartes de vœux, après j’ai fais les gouaches. L’ancien ministre de la culture Maurice Bandama, et M. Soul to soul m’ont beaucoup aidé.

En 2005, 2006, ils me soutenaient. Je vivais encore avec mes parents, mais j’ai reçu 500.000 FCFA pour mon installation. J’ai pris une maison, j’ai acheté mon matériel…
Je suis venu m’installer au feu de Sococe (supermarché) en 2005. Grâce au ministre Bandama et le président Alassane Ouattara, je me suis maintenant à l’intérieur depuis 2016.


Vous mentionniez tantôt l’aide du président de la république Alassane Ouattara en 2016. Une aide financière qui s’élevait à 10 000 000 FCFA. Qu’avez vous fait de cet argent?


J’ai d’abord acheté un taxi pour mes déplacements vu que je ne peux pas me déplacer aussi facilement. L’objectif en l’achetant c’était non seulement de faciliter mes déplacements, mais aussi de faire entrer à nouveau des fonds. Je me suis marié ensuite, ma femme est présentement malade et se trouve au village. Je m’occupe de ma famille… J’avais aussi un premier magasin qui est fermé aujourd’hui.


Puisque j’ai pu m’installer à Sococe après avoir reçu l’argent, j’ai aussi acheté mon matériel de travail qui devient en plus cher. Je prends le matériel à Marcory et à Adjamé. Je dépense au moins 80.000 FCFA dans l’achat de matériel, sans oublier le transport… Voilà la réalité des choses.


Vous avez fait des paysages et portraits vos spécialités. Quelle est votre source d’inspiration artistique?


Je voyage beaucoup et j’aime la nature. Cela ouvre mon esprit aux créations. C’est la nuit que je travail beaucoup plus. Mes meilleures réalisations ont été faites pendant des nuits. J’attends toujours 1 heure, 2 heures du matin avant de m’endormir.


Et qu’es ce qui séduit vos clients,selon vous?


Mes créations sont différentes des autres. Je ne les nomme pas, je ne fais que les signer. Mais à les voir, beaucoup d’entre eux se posent la question de savoir comment je réalise tout ce que vous voyez. Comment je mélange les peintures… Sur la plus part de mes tableaux il y a l’eau, car c’est la vie. J’aime beaucoup représenter la nature. Je suis aussi honnête avec mes clients.
Les tableaux vont de 5000 FCFA à 400 000 FCFA. Cela dépend de ce que les clients veulent. Je ne regarde pas le client. Mais plutôt la volonté à acheter le tableau. Avec la sincérité je les vends parfois à 1000 FCFA, 10000 FCFA, 15000 FCA…


Avec combien de personnes travaillez vous en ce moment?


Je travail avec deux personnes hommes pour l’instant.


Dans l’un de vos tableaux, on observe les silhouettes de deux femmes à la cuisine. L’une d’entre elle tient un mortier et semble piler quelque chose. Que voulez-vous faire ressortir à travers l’image?


Les femmes sont des battantes, et mettent tout en œuvre pour nourrir leur familles. Je vous disais que la nature, je l’adore. J’ai juste voulu faire ressortir le faite que les femmes sont des battantes. Mais aussi que le village, n’est pas uniquement la sorcellerie comme le pense les gens.


Pourquoi le choix de la couleur bleu ici?


Le bleu donne vie au dessin. Chaque dessin à ses couleurs en fonction de l’inspiration.


Sur une seconde réalisation vous avez marqué « l’espoir des justes, apporte la joie. Mais… » On observe deux hommes qui se serrent, l’un chrétien contre l’autre. Pouvez-vous donner plus de détails?


Il s’agit d’un chrétien et d’un musulman. Vous voyez l’un d’entre eux porte sur la tête un foulard que les musulmans ont l’habitude de porter. Cela pour, dire que dans la vie, malgré les différences religieuses il faut être ensemble. la haine détruit.


Et toutes ces couleurs Jaune, rouge, gris, violet, y l’écriture mélangée?

Cela pour faire ressortir la diversité et prôner l’amour malgré les différences.


Combien de tableaux vendez vous dans le mois?


En Afrique ici, les tableaux ne marchent pas vraiment. Dans le mois je peux vendre entre 3 et 5 tableaux. La période des fêtes est beaucoup plus favorable à la vente.


Quelles sont les difficultés que vous rencontrez?


Ma plus grosse difficulté actuelle c’est avoir une maison. La majorité des propriétaires que je rencontre pensent que je ne suis pas capable de payer la maison. Et je peine vraiment à en avoir.


Vos projets à long terme?


Je veux créer un centre d’aide pour les frères et sœurs qui n’ont pas d’activités si, j’ai les moyens nécessaires. Je veux leur apprendre l’art que je connais. Mais cela demande des moyens que je n’ai pas en ce moment, alors tout aide serait la bienvenue.


Interview réalisée par Marina Kouakou

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