10 000 visiteurs en moyenne par jour, près 100 stands, c’est la foire des belles lettres qui s’est déroulée en Côte d’Ivoire. Le mardi 17 mai, c’est au palais de Treichville que le ton a été donné pour la 12e édition du Salon international du livre d’Abidjan, Sila. Les amoureux du livre se sont empressés de prendre d’assaut le palais de la culture Bernard Dadié pour ne rien manquer au Sila 12.
Voixdefemme.net a rencontré Manick Siar-Titeca, psychologue de l’Éducation nationale, spécialité éducation, développement et apprentissage, au sein de l’Académie de la Guadeloupe. Cette exposante au Sila nous raconte son projet dans cet entretien accordé au magazine.
Présidente de la première maison d’édition des îles Caraïbes « Une voix, une histoire ». Comment est né ce projet ?
Le projet est né de ma formation première, c’est-à-dire, psychologue. Je travaille beaucoup avec les enfants, j’ai fait une étude sur le territoire. J’ai constaté qu’il avait un véritable désamour de la littérature caribéenne. C’est-à-dire nos élèves connaissent beaucoup d’auteurs de la littérature classique française. Mais dès qu’on parle d’auteurs de chez nous, il n’y avait plus personne. En plus, ils ne lisent pas beaucoup. Il y a un fort diletrisme également, et on se pose la question de l’égalité. Si nous voulons que tout le monde soit égal à la culture, qu’est ce qui fallait faire ? Il fallait être accessible et l’accessibilité dans le livre, c’est la mise en voix. Voilà d’où naît ce projet. Certains handicaps ou encore l’illettrisme ne seront plus des freins pour accéder à la culture caribéenne.
Depuis quand votre projet existe-il ?
Nous avons travaillé silencieusement de 2016 à 2020 pendant 4 ans afin de réunir l’équipe. Le lancement officiel de cette maison d’édition a eu lieu en 2020. Donc nous avons à peine, un an et quelques mois d’exercice.
Vous comptez combien d’écrivains et de narrateurs ?
Sur la plateforme, nous avons plus d’une cinquantaine de livres. Nous sommes en cours d’enregistrement de plus d’une cinquantaine. Nous avons signé avec l’Assedi, afin de mettre en voix la littérature ivoirienne. C’était important pour nous de faire un lien entre la caraïbe et l’Afrique. Parce qu’aussi douloureux qu’on parle de l’esclavage, la racine est ici, nous sommes rattachés à ici.
Comment le public a-t-il accès à vos livres ?
En plus d’être éditeurs, nous avons nos livres. Nous avons notre propre application sur App store et Play store. On télécharge l’application, » une voix, une histoire » et vous avez accès à nos histoires. C’est-à-dire, nous avons mêlé la tradition à l’oralité et à modernité à travers le téléphone et la tablette. On a la possibilité de faire un abonnement, un livre audio par mois ou deux livres audio par mois. On écoute comme si on a le livre tout le temps. On écoute et on réécoute, les étapes qu’on n’a pas saisies. Disponibles en ligne, les œuvres bénéficieront, par ailleurs, d’une visibilité sur le long terme.
Comment le public réagit-il ?
Il est très bien vu. Tout le monde est curieux du format. On a l’impression qu’on se perd en même temps. Ils ont de très beaux souvenirs. On a l’impression d’entendre des contes éveillés, comme à l’époque où les compteurs étaient là. C’est très bien accueilli, par tous même les maisons d’édition papier.
Que pensez-vous des auteurs africains en particulier les Ivoiriens ?
En participant à cette littérature, à ce Salon, je vois, que vous êtes très riches, c’est impressionnant ce que vous avez produit. C’est vrai aussi que le format plaît, nous avons des auteurs, qui sont venus vers nous et c’est tout un plaisir. Si nous devons travailler avec la Côte d’Ivoire, on travaillera en Côte d’Ivoire. C’est faire travailler ici des studios, des narrateurs quitte à les former, parce que c’est la création d’emplois et c’est important de faire tourner l’économie locale. On n’a pas besoin de faire sortir l’argent, il faut qu’il reste à l’intérieur du pays.
Que pensez-vous du Sila, pour votre première participation ?
Pour une première, je pense que l’organisation est très bien faite. On était un peu effrayé au départ, tout n’avait pas l’air d’être prêt. Mais dès le premier jour, alors carré ! On dit que le noir ne sait pas organiser, mais ce n’est pas vrai. On sait le faire. Enfants, parents, auteurs, non-voyants… c’est tout une foule qui adhère à notre format, et c’est magnifique !
Réalisé par Mam Ouattara