La 10 ème édition du Djaka Festival (la joie) en pays Dida, a débuté le 10 décembre, pour s’achever le 12 décembre 2020. Elle s’est tenue au stade municipal de Divo, sous le thème « Bhobla » (paix). Une occasion qui a permis de découvrir quelques chants et pas de réjouissance propre à la région du Lôh-djiboua. VoixVoiedefemme y était.
Il est 12 heures 30 minutes. Tam-tam, baguettes, sont singulièrement les instruments de base utilisés pour les différentes prestations de groupes venus de localités diverses. Gbagroube, Brabodougou, Daboré, Braboré, Nebo etc. Vêtus majoritairement du pagne raphia ce 11 décembre 2020, ces groupes artistiques prônent à l’unanimité la paix, la réconciliation, et la joie via leurs passages scénique.
La prestation du groupe Akra Oualo de Baboré, village situé à 7 km de la ville de Divo en est l’illustration parfaite. « Le titre que nous chantions est ‘’Dogblo’’. Dans cette chanson, nous disions que nous avons répondu à l’appel de Djaka pour fêter dans l’amour, la joie et dans la paix. Nous dansions pour tenter d’oublier les difficultés de l’année. Parce que nous avons été éprouvés par de nombreux décès », explique la Présidente des femmes de Braboré, Marguerite Tiékpo.
D’autres groupes comme ‘’Awalé’’ de Daboré, qui est à sa première participation au festival, ont marqué l’assistance. L’un des titres chanté, ‘‘Djaka’’, a spécialement été modifié pour cette occasion de joie. Il est Initialement intitulé ‘‘Sougrou té’’ lorsqu’il est chanté au village. « En fait, Sougrou té signifie : mon copain ( amant) est beau comme une tubercule de manioc », explique Sandrine Baye, fille du terroir.
L’histoire de cette chanson remonte aux temps très anciens. Histoire qu’on accepte de nous dévoiler. «Une femme mariée avait un amant dans un autre village de la région. Un matin, on lui a annoncé le décès de ce dernier. Puisqu’elle ne pouvait pas le dire à son mari, elle s’est rendue au champs pour déterrer une tubercule de manioc. De là, tenant sa tubercule en main, elle a commencé à pleurer en chantant. Se croyant seule, elle disait que la tubercule de manioc qu’elle tenait en main était jolie comme son amant. Contre toute attente, son mari l’a surprise et a entendu ce qu’elle disait. Il lui demanda de recommencer la chanson. Ce qu’elle fit, avouant ainsi son infidélité », raconte Martine Agobé, la Présidente dudit groupe. La sanction s’en était suivie puisqu’elle a été répudiée par son mari…
Dans la soirée d’autres prestations saisissantes ont égayé les participants à ce festival. Dès 14 heures, la place est faite aux danses de réjouissances. C’est la danse ‘‘Zaourada’’, produit unique du village Gbagodé qui ouvre le bal. Cette danse traditionnelle était prestée à l’occasion de cérémonies initiatiques. Mais elle est désormais transformée en danse de réjouissance ordinaire. Le coordonnateur départemental de Djaka Festival de la communauté international, Babo David raconte la légende de ce patrimoine artistique. « C’est la traduction de ‘‘Saouada ‘’. ‘’Sa ‘‘, c’est le fruit d’un arbre séché qui sert à fabriquer les instruments de musique, noués aux pieds des danseurs. C’est sous cet arbre fruitier qu’un chasseur a vu des génies danser à plusieurs reprises. Et il s’en est inspiré pour amener cette danse dans le village quand il y est retourné », raconte ce bon connaisseur des coutumes Dida. Selon lui, c’est l’avènement du christianisme qui a levé le tabou autour de cette danse que seuls les initiés pouvaient esquisser. Aujourd’hui, elle n’est plus initiatique…
Marina Kouakou, envoyée spéciale