La ménarche de la jeune fille (ndlr les premières menstruations qui surviennent entre l’âge de 11 et 14 ans), est célébrée dans certaines familles. Ce moment est jugé très essentiel dans la vie de cette dernière. Cela marque le passage de son enfance à l’adolescence. Cette étape confère à la jeune fille le droit de donner la vie et d’avoir avec prudence des rapports sexuels. Par contre dans certaines communautés il est interdit à l’adolescente pendant les menstrues d’exercer toute activité principalement traditionnelle et religieuse.

L’Atovlé chez les Baoulé ou la célébration de la ménarche

C’est l’un des rares peuples en Côte d’Ivoire à célébrer la ménarche de la jeune fille. C’est une véritable fête de réjouissance pour annoncer « La nouvelle femme », l’Atovlé. Après sa période de menstrues, la jeune fille est lavée par ses « grands-mères ». Elle est somptueusement habillée, parée de bijoux de famille.  Elle est présentée aux membres de la famille, aux amis. Elle se promène à travers le village pour « qu’on la voit ». Une nouvelle femme vient de faire son apparition.

Cette cérémonie a une portée hautement socio-culturelle. Une femme qui n’a pas été « lavée » sera frappée d’une malédiction. Elle perdra son premier né ou elle ne sera pas autorisée à le garder au sein du village. https://voiedefemme.net/culture-akan-quand-le-lavage-ba-kekan-transforme-la-jeune-fille/

Croyances traditionnelles

Pendant sa période de saignements, la femme est écartée de toutes les pratiques ou croyances ancestrales (ndlr rivière sacrée, idolâtrie). Kouassi Adjoua rosalie, est originaire de la ville d’Abengourou, située à 210 km d’Abidjan, à l’Est de la Cote d’Ivoire. La quadragénaire nous donne un aperçu des interdits de la femme en période de menstrues.

Considéré comme ayant un effet inhibiteur sur des pratiques du maraboutage ou du fétichisme, il est scrupuleusement interdit aux personnes (souvent des hommes) d’être en contact avec une femme en règles : « Il y a des personnes qui vont faire des médicaments pour se protéger. On interdit à ces personnes de s’approcher d’une femme en période de menstrues. Les menstrues détruisent beaucoup de choses ; comme le maraboutage et l’idolâtrie » confie-t-elle avant d’insister « la femme « indisposée » n’a pas le droit de cuisiner. Et ça jusqu’à ce qu’elle finisse sa période de menstrues.  Elle n’a pas le droit de traverser une rivière. Parce qu’on considère qu’elle est sale et impure. Connaissant la tradition et l’importance des rivières dans nos villages, cette dernière n’a pas le droit de les traverser ».  

« La jeune fille ou la femme qui a ses règles doit quitter la maison pendant ses menstrues. Elle sera logée chez un parent ou chez les voisins » nous affirme Mme S. Jacqueline et de préciser: « Chez les Akans, principalement dans les familles des femmes « féticheuses ou guérisseuses », il leur est interdit de s’approcher des idoles protectrices de la famille. Ni de se rendre dans les espaces réservées à l’adoration ».  

Sur le plan de l’hygiène, la femme en menstruations est obligée de veiller à sa propreté « Quand tu finis la période, ou même pendant, il est recommandé de changer tous tes draps. Tu te laves, et tu fais une bonne lessive pour ne pas laisser de trace. Et cela concerne la femme mariée. » Ces pratiques qui tendent à disparaitre dans nos us et coutume restent tout de même perceptibles dans certaines contrées.

Ce que disent les religieux

Dans les communautés religieuses, le constat est fait en Islam. La jeune fille ou femme mariée en période de menstrues est déconseillé de fréquenter les lieux de cultes. Ibrahim Sié, président du sous-comité 2 de l’AEEMCI (Association des Élèves et Étudiants Musulmans de Cote d’Ivoire) de Yopougon, nous expose le fondement de ces interdits. « Allah déclare ceci dans le noble Coran : « ils t’interrogeront aussi sur les menstrues réponds-leur, la menstruation est une souillure. Tenez-vous à l’écart de vos femmes durant cette période ; n’ayez point de rapports charnels avec elles tant qu’elles ne se sont pas purifiées. Mais une fois qu’elles sont en état de pureté, reprenez vos rapports avec elles, Dieu aime ceux qui se repentent et ceux qui se purifient. (Ndlr référencement, Chapitre 2,la vache, verset 222). » explique-t-il. Ce verset ressort clairement que la menstruation est considérée comme une souillure et une impureté.

Ibrahim explique que « Les femmes lorsqu’elles sont dans cet état ressentent de la gêne. La femme est interdite dans les lieux de cultes du fait que Dieu étant pur. Il n’agrée que ce qui est pur, propre et sain. Il est donc interdit à une femme d’avoir des rapports intimes. Elle ne prie pas pendant cette période. Elle n’entre pas dans les lieux de prières. Elle ne touche pas le coran. Mais en état de menstruations, elle peut faire des évocations avec le chapelet ou même des bénédictions. Il faut préciser qu’à la différence des juifs, selon l’Islam, la femme peut avoir tout autre sorte de contact. Elle peut cuisiner, manger, s’amuser, être au petit soin de sa famille et de son homme. Toujours en prenant le soin de bien se couvrir. Il peut même jouir d’elle par des caresses, embrassade mais sans pénétration. »

Ailleurs, hors de nos frontières, la jeune fille en règles est isolée de la société comme à l’ouest du Népal et en inde. La femme en menstruation est intouchable, exilées. Elles sont interdites de tout contact avec l’eau (rivière, mer, fleuve, lac…) faute de quoi l’eau risquerait d’être polluée par les menstrues. Au Malawi et au Tchad parler de menstruation est jugés irrespectueux, déshonorant et honteux pour la femme. Dans ce cas toutes les femmes sont contraintes de rester réservées pendant leur période de menstruation.

Bekanty N’KO

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