Elles sont nombreuses, ces femmes qui mettent au monde des enfants prématurés. Alors que dans nos hôpitaux, les couveuses sont en nombre insuffisants. Par conséquent, les mamans n’ont pas la chance de voir leurs progénitures séjourner dans ces appareils. En pareille situation, les chances de survis du bébé sont moindres. Que faire donc ? L’hôpital général de Gagnoa (HGG), après avoir muri la réflexion a mis en place l’unité de soins mère-kangourou.

En quoi cela consiste ? « Le service mère-kangourou est une sous unité de la néonatalogie. On y admet les bébés prématurés, c’est-à-dire ceux qui ont moins de 1500 grammes », a présenté Dr. Asséré Kouassi. Le médecin généraliste du service de pédiatrie, explique qu’à l’image de l’animal kangourou, qui porte son bébé dans la poitrine, les mamans qui ont les enfants prématurés en font de même. Cela est avantageux pour le nourrisson, à en croire le médecin généraliste. « Cela permet à l’enfant d’avoir une meilleure croissance. Il gagne aussi en poids », énumère-t-il, les bienfaits de cette méthode thérapeutique qui existe à l’HGG, sur l’initiative du docteur Yao Kouakou Adolphe, directeur de cet hôpital.

A son arrivée à ce poste le 2 avril 2019, il a constaté que peu de bébés prématurés parvenaient à vivre. C’est ainsi que le directeur a sollicité l’expertise du professeur Assé Kouadio Vincent, chef du service pédiatrie au Chu de Bouaké.

Partage d’expériences

La collaboration Bouaké et Gagnoa a permis au professeur de former les agents de santé de la cité du fromager au système mère-kangourou. « Nous sommes venus à l’HGG pour apporter notre contribution à la résolution du problème. On voit là un bel exemple de coopération pour réduire la mortalité chez les prématurés. C’est pour cela que nous avons mis en place l’unité de soins mère-kangourou », a fait savoir le professeur. Depuis que cette unité est fonctionnelle, le taux de mortalité des prématurés a baissé pendant que le taux de fréquentation de l’hôpital est en hausse. « Notre objectif est donc atteint. Il va falloir maintenir cet effort en mettant en place un mécanisme de suivi », a suggéré le professeur de pédiatrie.

« Les enfants prématurés étaient mis dans des couveuses. Cela déshumanise. C’est-à-dire on met votre enfant dans une machine et vous ne le voyez pas. Avec le système mère-kangourou, l’enfant est dans la couveuse la nuit et dans la journée, la mère porte son bébé dans la poitrine pendant une durée de 8 heures de temps », nous informe le directeur de l’HGG. Deux ou trois fois par semaine, selon le poids de leurs bébés, les mères candidates au système kangourou, se retrouvent dans la salle affectée à cette pratique où elles se mettent torses nus comme le bébé.

Technique du système kangourou

 « Nous avons un tissu qu’on utilise pour attacher le bébé sur la poitrine de sa mère. Ainsi, l’enfant reste peau à peau, en contact avec sa maman pendant 8 heures. En dehors de la mère, le père aussi peut s’adonner à cet exercice. Parce que le prématuré, contrairement au bébé qui a fait 9 mois dans le ventre de sa mère, a besoin de la chaleur humaine pour se sentir au mieux de sa forme », fait remarquer docteur Asséré Kouassi. Entouré des sages femmes et infirmières, l’équipe médicale est aux petits soins des mères-kangourous pour les aider à porter leurs attributs de circonstance. Après avoir fixé solidement le nourrisson à la poitrine de la maman, au moyen d’un tissu, on lui fait porter un peignoir tout blanc, couvrant le corps du bébé et celui de la maman. A l’exception de la tête de l’enfant, puisqu’il a besoin de respirer. Après quoi, la mère s’allonge sur le dos, dans son lit, le temps que l’heure impartie pour cette séance s’égrène. D’ici là, elle dispose de la télévision pour ‘’tuer’’ le temps. Lorsque le bébé commence à pleurer, il n’est pas interdit qu’elle lui donne à téter avant de continuer la séance. « En dehors de l’hôpital les parents peuvent poursuivre cette opération chez eux à la maison. Soit avec le père ou la mère », mentionne Dr Asséré. Il fait remarquer qu’au début, c’était difficile de convaincre les mamans des prématurés à visiter l’unité de soins mère-kangourou. Mais, vu les résultats satisfaisants enregistrés par ce service, les fréquentations se sont accrues.

Fréquentation en hausse

Les lundis et jeudis, l’unité ne désemplie pas. Les mères-kangourous affluent. Asséré ne manque pas de lancer un appel aux mamans qui gardent encore chez elles à la maison des prématurés. « L’unité de soins mère-kangourou est à leur disposition. Si ton enfant est né prématuré, ce n’est pas une fatalité », rassure-t-il. Un appel réitéré par Kouakou Akissi Christelle. « Je dis aux mères qui ont mis au monde un enfant prématuré, qu’il n’y a pas lieu de se décourager. La solution, c’est le système mère-kangourou », a exhorté la locatrice de l’unité de soins mère-kangourou de l’hôpital général de Gagnoa. Elle fréquente ce service depuis trois mois. « Actuellement mon bébé se porte très bien », s’est-elle exprimée en serrant son bébé dans sa poitrine. La même joie se lit sur le visage de Loraine Ikpo Ange, une jeune mère âgée de 27 ans. « Je suis à mon deuxième bébé. Contrairement au premier, celui là est un prématuré. A l’accouchement, il avait un poids de 1150 grammes. J’ai eu peur et je n’imaginais pas que cet enfant allait vivre. Mais avec le système mère-kangourou, mon enfant a aujourd’hui 1,5 kilogramme. Je suis une mère heureuse », se félicite la nourrice. « Le système mère-kangourou est très important pour la survie des bébés nés de façon prématurée », conseille la mère.

« Les résultats enregistrés par l’unité de soins mère-kangourou de l’HGG sont une source de satisfaction pour nous, qui sommes du corps médical mais aussi pour les mamans elles mêmes », a conclu le médecin généraliste du service de pédiatrie de l’HGG.

Alain Doua   

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