Depuis quelques mois, le paysage change. À Abidjan, il est courant désormais de rencontrer des femmes au volant de taxis, orange, VTC. Et elles assurent ! Rencontre avec Yéziaho Carole Philomène, chauffeur de taxi Yango.
Depuis combien de temps travaillez-vous en tant que chauffeur de taxi ?
A peine deux mois !
Vous étiez chauffeur de taxi auparavant ?
Non, pas du tout. J’ai pu acquérir une voiture il y a un an. J’ai donc pu me faire la main depuis un an. C’est à la suite de cela que j’ai décidé d’utiliser ma voiture pour travailler en tant que chauffeur. Yango est très pratique. Il n’y a rien d’extraordinaire. C’est un travail comme un autre.
Que faisiez-vous alors avant cela ?
Je suis maquilleuse Plateau de métier. Faire le taxi Yango est un travail additif, et non à plein temps. C’est un des éléments que j’apprécie d’ailleurs avec cette formule.
C’est donc pratique pour vous comme occupation ? Vous ne travaillez pas sous pression ?
Bien au contraire ! C’est une belle trouvaille de la part des promoteurs. On ne va donc pas bouder cela ! C’est réellement quelque chose de nouveau en Afrique. C’est d’autant plus facile, qu’à présent, nos routes sont bien répertoriées et intéressantes à utiliser, grâce au GPS.
D’aucuns diraient que c’est un métier d’homme !
Certes, les débuts n’ont pas été faciles. Ce n’était pas évident. Pour autant, cette possibilité qu’offre Yango est à la portée de tout le monde ; homme, femme….
Lire aussi : K. Mélanie, chauffeur de taxi : « J’ai réalisé mon rêve »
Que gagnez-vous de plus avec cette formule ?
Je suis quelqu’un de communicatif et de psychologue. J’aime rencontrer et découvrir tous types de personnes ; évoluer loin de ma zone de confort et de mon entourage immédiat. Cela me permet de pouvoir mieux interagir avec les étrangers ; savoir comment ils réfléchissent, comment ils voient la vie. Je peux bénéficier de cela lorsqu’ils montent dans mon taxi. C’est vraiment ce qui me plait dans ce travail.
Comment conciliez-vous vos deux boulots ? Avez-vous le temps de vous reposer ?
Cela n’a rien de contraignant. J’organise mon emploi du temps comme bon me semble. Je peux me dire : Bon, aujourd’hui, je ne vais rien faire. Puis, vers 14 heures, je me dis pourquoi ne pas aller faire un tour dehors ; histoire de me mettre 10 000 frs dans la poche ! En tant que maquilleuse, je travaille essentiellement le samedi et le dimanche. J’ai donc cinq jours ouvrables, où je ne travaille pas. A moins d’être sur un anniversaire ou sur un mariage pour maquiller.
Qu’est-ce qui vous séduit dans l’application Yango ? Car, il existe d’autres formules que celle-là !
Personnellement, les autres formules ne me gênent pas. Mais je ne les maîtrise pas autant que celle de Yango. J’ai commencé avec Yango, en tant que cliente, et non en tant que chauffeur et ce fut une expérience très positive, alors j’ai pensé si je devais essayer de travailler avec leur application en tant que chauffeur.
Racontez-nous votre expérience avec Yango en tant que chauffeur.
C’est une expérience positive, même si c’est un peu rude, mais aucun métier n’est exempt de petits coups durs. Ce que je retiens de réellement positif pour la femme que je suis, c’est que je maitrise mon emploi du temps. Je vois cette activité comme un tremplin. Cela me permet de faire des économies. Plus tard, je pourrai ainsi ouvrir une boutique, devenir entrepreneure, puis, cheffe d’entreprise…
En tant que femme évoluant dans ce secteur dominé par les hommes, comment ressentez-vous cela ? Et quelle perception ont les gens sur vous, notamment vos clients ?
Je suis une féministe dans l’âme. Je reste persuadée qu’il n’y pas de métiers pour les hommes, d’un côté, et de métiers pour les femmes de l’autre. Je suis de celles qui exercent même les « métiers d’hommes », mieux que les hommes, eux-mêmes ! Je n’aime pas cette caricature. Je pense que tout le monde peut exercer tout type de métier. Je pense que les applications de covoiturage gagneraient à réfléchir à la manière d’attirer plus de femmes dans ce travail pour être en accord avec la politique de genre et l’émancipation des femmes ; Yango est un exemple positif à cet égard, car le service emploie déjà des dizaines de femmes.
Les clients sont-ils étonnés que ce soit une femme qui les transporte dans un taxi ?
Tous mes clients sont étonnés, du premier au dernier ! Certains réagissent en disant : « mais c’est une femme !! » ou, “vous vous êtes trompé, c’est un Yango que j’ai commandé. » D’autres ont peur que je les conduise. Mais à la fin de la course, ils sont tous unanimes pour reconnaître que je conduis comme… un homme. A ce moment-là, je réponds que c’est péjoratif, car, je conduis bien. Point barre.
Réalisé par Fatogoma Silué