Publié le 15 septembre, 2022

Cela fait plusieurs années que les femmes ont décidé de défier les lois ancestrales, sortant du rôle de ‘’gardiennes de la maison’’ pour désormais affronter tous les corps de métier. Elles sont de plus en plus nombreuses à exercer « des métiers d’hommes ». Pour elles, il n’y a ni métier de femme ni d’homme aujourd’hui. C’est le cas de Mme Tapé Adelaïde, conductrice de chariot élévateur, qui, à cœur ouvert, s’est prêtée à nos questions… Interview.

Depuis quand exercez-vous ce métier ?

Je suis conductrice de chariot élévateur depuis 2018.

Qu’est-ce qui vous a intéressé dans un tel métier ?

De nature, je suis quelqu’un qui aime la conduite. Je me suis dit qu’une femme qui n’est pas allée à l’école, il lui sera difficile de trouver un métier. Parce que si tu n’as pas de diplômes, il y a des corps de métiers dans lesquels tu ne peux pas rentrer. J’ai donc décidé de m’intéresser à ce métier pour avoir plus tard l’opportunité d’exercer dans d’autres corps de métier.

Comment avez-vous eu accès à ce secteur exactement ?

J’ai fait mon permis de conduire avant d’arriver ici. J’ai par la suite postulé pour intégrer l’équipe de la société qui est une structure qui réalise des opérations de transport de marchandises, de produits et toutes activités de manutention en sous-traitance…

Votre niveau d’étude ?

J’ai stoppé mes études en classe de 4e.

Quel est le regard des hommes à votre égard ?

La majorité des hommes me félicitent pour mon courage. Ils sont fiers et très heureux de voir une femme dans une telle activité.

Comment votre famille a pris cette nouvelle de vous voir exercer un métier considéré comme celui des hommes ?

Mon mari avec qui je suis n’approuve pas trop que je travaille ici. Mais bon, puisque les conditions ne sont pas réunies à la maison, il n’a pas trop le choix. Pour le moment, il me laisse venir travailler, mais au fond de lui, il n’aime pas que je travaille dans ce corps de métier. C’est seulement à cause des conditions difficiles de la maison qu’il me laisse y aller.

Il veut vous voir dans quel corps de métier ?

Il a plutôt souhaité que j’intègre la Sotra, pour que je sois conductrice de bus. C’est de ce métier qui parle le plus. Mais, malheureusement, au moment où le concours a été lancé, j’étais encore nourrice donc je n’ai pu y participer.

Votre travail consiste à quoi exactement ?

conductrice

Bon, en ce moment, c’est l’extra-potage que je fais. C’est-à-dire que je fais le transfert des sacs de riz. Je prends les sacs de riz d’un camion de transport pour les transférer sur d’autres camions, ou des camions à un magasin.  

Trouvez-vous du plaisir à exercer dans ce métier ?

De nos jours, vous savez que c’est difficile de trouver du travail. Et puisque pour le moment, pour quelqu’un qui n’a pas de diplôme pour passer un concours comme moi, c’est l’un des moyens qui s’offrent à nous. Je suis donc heureuse d’être là. Je le fais par nécessité.

Financièrement, est-ce que vous vous en sortez ?

Pour un pointage de 5 000 F/jour, je peux dire que ça va un peu. Dire que j’arrive à m’en sortir financièrement, pas trop. Mais, une chose est sûre, c’est qu’on arrive à s’entendre sur les dépenses à la maison.  Je trouve surtout que c’est beaucoup mieux que de rester à la maison et ne rien faire.

Êtes-vous mariée ?

Pas légalement, mais je le suis coutumièrement. Je vis donc avec un homme avec qui nous avons trois filles.

Vous êtes un exemple pour plusieurs jeunes filles. Avez-vous des conseils à donner à ces filles qui hésitent encore à se lancer dans un corps de métier ?

Mes conseils à leur endroit : c’est que, ce n’est pas parce que tu n’es pas allée à l’école que tu vas t’asseoir à la maison. Actuellement où nous allons, le monde devient très difficile…

Je leur demande alors de se lever pour trouver une activité pour aider leur mari. J’encourage mes sœurs à se lever pour se battre. De nos jours, il n’y pas de métier pour homme et un métier pour les femmes. Si tu veux, tu peux. Une femme peut rentrer dans tous les domaines d’activité si elle veut. Je les incite donc de se lever pour se prendre en charge.

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Entretien réalisé par Arsène Lohouré

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