Publié le 1 mai, 2020

Dans le cadre de la riposte contre le Covid-19, le gouvernement ivoirien a décidé du confinement obligatoire, à domicile, de toutes les personnes fragiles, notamment les personnes âgées et celles souffrant de maladies chroniques. Une mesure difficile à observer pour les insuffisants rénaux, se revendiquant de cette catégorie de personnes.

Ce matin du 29 avril 2020, Bernadette s’est réveillée très tôt. Elle passe en dialyse, au Centre national de prévention et de traitement de l’insuffisance rénale (Cnptir), sis au cœur du CHU d’Abidjan-Cocody. Pour ces soins subventionnés par l’Etat, elle est autorisée à sortir de son confinement obligatoire de Koumassi-Remblais. Le 9 avril dernier, le gouvernement ivoirien n’a-t-il enjoint ces personnes fragiles souffrant de maladies chroniques et les personnes âgées à rester à la maison ?

Bernadette s’enchante de quitter chez elle aujourd’hui, mais cette jeune femme se plaint de ne plus pouvoir supporter ce confinement. « Je ne peux plus sortir pour faire son petit commerce qui me permettait de ‘’joindre les deux bouts’’ et surtout de payer mon kit de dialyse à 1750 F CFA ».  Au-delà de l’achat de ce kit déjà subventionné en grande partie, les dialysés ont besoin de plusieurs médicament riche en calcium, en fer pour se mettre à l’abri des anémies. Certains sont hypertendus, d’autres malades de diabète…

Chômage

Selon le président de l’Association des dialysés et insuffisants rénaux de Côte d’Ivoire (Aidir), le confinement obligatoire est difficile à observer par les 600 membres de l’organisation. « Nous vivons une situation très pénible. D’autant plus que nous sommes d’abord des personnes vulnérables. Nous avions déjà des difficultés pour payer le kit de dialyse, avant la crise du covid-19. Avec le confinement obligatoire, on ne peut plus sortir pour se débrouiller et trouver cet argent », témoignage Moussa Bamba.

Sous dialysés…

En 2018, le Service d’aide médicale d’urgence (Samu) devenu Cnptir estimait à près de 5000 le nombre de personnes souffrants d’insuffisance rénale en Côte d’Ivoire. Depuis le gouvernement a ouvert des centres dans plusieurs villes de l’intérieur du pays. Notamment Gagnoa, Bouaké, Yamoussoukro et Korhogo…

A Abidjan, les communes de Cocody, Adjamé, Treichville, et Yopougon ont également leurs centres d’accueil des dialysés. Mais la pression est forte sur ces établissements sanitaires, selon un cadre de la santé, rencontré au Cnptir de Cocody.  

Parlant de la conjoncture sanitaire du Covid-19, l’agent de santé révèle que la durée des séances de dialyse a été revues à la baisse. Avant la crise sanitaire, les dialysés avaient droit à huit heures par séance de dialyse en une semaine. Aujourd’hui, ce temps a été ramené à six heures de séance par semaine. « Ça nous défavorise.  Nous sommes sous dialysés », regrette le président de l’Aidir. Histoire de signifier que l’épuration du sang ne se fait plus 100%…

La prescription normale pour cette épuration sanguine, selon lui, est de trois séances de quatre heures par semaine. Soit 12 par semaine. Avant la crise du coronavirus, cette prescription n’était pas observée. Elle était réduite de de quatre heures. « On a invoqué des problèmes d’argent et on a réduit cela de deux séances », regrette M. Bamba. La crise sanitaire a encore revue à la baisse ces prescriptions.

C’est avec bonheur que les milliers de dialysés apprennent que le gouvernement s’active pour venir en aide aux personnes vulnérables. Mais ils attendent encore d’être pris en compte. Bamba Moussa et les membres de l’Aidir espèrent leur prise en compte dans ces mesures. Ils souhaitent notamment un forfait dans le payement des kits durant cette période. « Le gouvernement a déjà fait beaucoup pour nous en subventionnant le kit. Mais la crise sanitaire qui nous oblige au confinement ne nous permet plus de trouver de l’argent pour nos soins. Nous aurions souhaité que le gouvernement prenne en charge, l’intégralité des frais de ces kit, durant les trois mois qui suivent », plaide M. Bamba.

Pour lui, l’immense majorité des dialysés ont le sentiment d’avoir été oubliés dans les mesures sociales de l’Etat ivoirien. « Il n’y a pas eu de mesure d’accompagnement pour ce confinement. Nous sommes des personnes vulnérables. On nous a dit que le gouvernement devait nous donner 25 000 FCFA.  Mais on ne voit rien à l’horizon. Chacun est livré à lui-même », se plaint en tout cas Bernadette.

Ténin Bè Ousmane

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