Les jeunes filles sont les plus exposées à la pandémie du Sida (Photo: France 24)

Publié le 4 août, 2020

La pandémie du coronavirus a perturbé les programmes traditionnels des systèmes sanitaires du monde. En Côte d’Ivoire, le programme national de lutte contre le Sida n’a pas dérogé à la règle. Selon le dernier rapport de ONU-Sida, le pays affiche un taux de prévalence de près de 2,4%, l’un des chiffres les plus élevés de la sous-région.

Dans les centres de maladies infectieuses en Côte d’Ivoire, des malades atteints de Sida sont couchés, souvent sans soins et ils meurent. Ainsi donc, le Sida, dernier stade de l’infection au VIH, continue de tuer par suite des maladies opportunistes auxquelles il donne lieu.

Ce jour du 15 juillet 2020, le Pr Ehui Eboi s’adressait aux journalistes, la mine plutôt grave. Le Directeur Coordonnateur du Programme nationaliste de lutte contre le Sida invitait, lors de cet atelier à Abidjan, les acteurs des médias à s’impliquer davantage dans la sensibilisation contre cette maladie, détecté aux Etats Unis en 1981, et dont le premier cas a été découvert en Côte d’Ivoire en 1985.

Au regard des chiffres alarmants révélés par le dernier rapport de ONU-Sida, la cheville ouvrière de la riposte contre cette maladie ne cache plus son inquiétude…

Selon ce rapport, 428.827 personnes vivent avec le VIH/Sida cette année 2020 avec une forte prédominance chez les femmes qui représentent 64,5% de l’ensemble des personnes infectées et 7,4% chez les enfants de 0 à 14 ans avec un pic de la contamination chez les 34 à 44 ans.
La ville d’Abidjan représente 37% des personnes infectées et c’est la commune de Yopougon qui concentre le plus grand nombre de victimes.

Cette année, la recrudescence des cas positifs de Sida s’expliquerait par la pandémie de la Covid-19. Selon l’OMS, la lutte contre la propagation du coronavirus a en effet perturbé les programmes en cours dans le pays.

Mais Elysée Leroux, président du Réseau ivoirien des jeunes contre le Sida (Rijes) pense que le fléau reprend du terrain parce qu’il ne fait plus peur.  « Aujourd’hui, le VIH n’effraie plus les jeunes. Ce qui les effraie, c’est plutôt une grossesse. Ils préfèrent avoir des rapports sexuels non protégés, étant entendu qu’ils vont utiliser la pilule le lendemain. Pour eux, c’est principalement les grossesses qu’il faut éviter et non le VIH », regrette Leroux Elysée. Cette peur s’est également effondrée grâce aux progrès enregistré par la médecine dans ce domaine, notamment les médicaments rétroviraux, la possibilité de protéger le bébé contre le virus d’une mère contaminée.

Le président du Rijes pense que les nouvelles technologies de l’information, notamment les réseaux sociaux contribue à ce relâchement. « Aujourd’hui, les jeunes utilisent beaucoup plus les médias sociaux et c’est entre jeunes qu’ils se donnent des conseils. Alors qu’ils n’ont pas forcément toutes les bonnes informations. Ces fausses informations font qu’il y a une nouvelle contamination, de nouvelles infections chez les jeunes », explique-t-il.

Le non-respect des mesures de préventions primaires, à savoir l’abstinence, la fidélité et le port du préservatif explique également ces chiffres alarmants.

Et si les filles sont les plus exposées, c’est, selon le président du Rijes, à cause de leur vulnérabilité. « Que ce soit au niveau de la scolarisation, de l’emploi, ce sont les filles qui sont les plus vulnérables. Et ce sont encore elles qui souffrent de nos coutumes et des traditions », fait remarquer M. Leroux avant d’ajouter : « Comme elles n’ont pas accès à l’éducation plus que les garçons, elles n’ont pas appris à négocier le préservatif.  Et n’étant pas financièrement fortes, elles subissent les humeurs des hommes ; elles se sentent obligées de faire ce que demande la personnes pourvoyeuses de richesses ». Selon ces explications, les hommes qui ont plus d’un partenaire sexuel et qui n’utiliser le préservatif exposent leurs victimes au VIH.

Cette recrudescence du Sida oblige le Pnls a redoubler d’effort s’il veut atteindre l’objectif 90.90.90 de l’ONUsida pour l’éradication du Sida comme problème de santé publique à l’horizon 2030.

Pour le Dr Adingra, consultant chargé de la prévention au Pnls, « une analyse situationnelle du marché des préservatifs dans le pays et des propositions de solutions s’imposent pour l’atteinte de ces objectifs ».

Le président du Rijes propose l’intensification des programmes d’éducation des jeunes filles et d’autonomisation des femmes. « Il y a l’Education complète sur la sexualité (ECS). C’est un bon outil qui permettrait d’éviter beaucoup de chose si toute la communauté l’utilisait en direction des adolescentes et des adolescents et les sujets jeunes. Cela allait leur donner tout ce dont ils auraient besoin comme arme en termes d’information, de prévention, de savoir-faire et de savoir être. L’ECS donne des aptitudes depuis les violences basées sur le genre jusqu’à la prévention des grossesses précoces, les grossesses non désirées et même des infections aux IST et même des infections au VIH », propose M. Leroux.

Ténin Bè Ousmane

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