Plusieurs box et étals du marché d'Abobo sont parti en feu dans la nuit du 25 au 26 juin 2020.

Publié le 6 juillet, 2020

En Côte d’Ivoire, les nouvelles sur les marchés qui partent en feu n’émeuvent pratiquement plus. Tant le phénomène d’incendie est récurrent sur ces sites qui rassembles des milliers de commerçants.

Vendredi 26 juin 2020. 4 heures du matin. Dame Z. Pascaline est tiré de son sommeil par la sonnerie de son téléphone posé au chevet du lit. Ce n’est pas la sonnerie du réveil. A l’autre bout du fil, le correspondant lui annonce la mauvaise nouvelle. Le marché brule. Son magasin de chaussure fait partie des box assaillis par les flammes. La commerçante, affolée, sursaute de son lit, sort à vive allure de cette cour commune du quartier Kénédy et accourt… Trop tard. Tout est en cendre ! L’incendie qui a débuté vers 3 heures du matin au marché d’Abobo, selon des témoins s’est poursuivi jusqu’à 6 heures. Z. Pascaline, en larmes, estime à 13 millions le préjudice. « Tout a brulé », crie-t-elle les yeux en sanglot sur les ruines de son commerce.

Installations anarchiques d’électricité

Au total 48 box et 55 étals sont partis en feu dans le marché d’Abobo, cette nuit du 25 au 26 juin 2020. Il y a trois ans, en septembre 2017, un incendie avait dévasté les deux tiers des installations de ce marché construit il y a 36 ans, en 1984. Bâti pour 1500 personnes, le site de 3000 mètres carré rassemble aujourd’hui plus de 6000 usagers.

« Les marchés tels qu’ils sont faits, sont fait pour bruler », conclu un expert en urbanisme qui n’a pas souhaité être cité. Témoin de la construction de la plupart des marchés des 10 communes d’Abidjan et de plusieurs villes de l’intérieur du pays, ce spécialiste dénonce la vétusté de ces sites.

Il révèle que les produits « utilisés pour la construction de ces marchés sont des matériaux qui brulent ». Il reconnait que la cherté des matériaux « qui ne brulent pas ». A chaque incendie, les images de destruction sont les mêmes. Et généralement tout part d’une étincelle comme ce fut le dernier cas en date à Abobo.

Et il ne se passe pas d’année sans que les Ivoiriens n’apprennent qu’un tel accident s’est produit dans l’une des villes du pays. Cette année, les commerçants d’une dizaine de marchés d’Abidjan et des villes de l’intérieur du pays ont été sinistrés.

Dans la plupart des marché, les magasins qui se développement autour des bâtiments centraux ne sont généralement pas électrifiés par la Compagnie ivoirienne d’électricité (CIE). « On utilise très souvent des câbles qui ne sont pas conformes à la consommation de ceux à qui ont fourni l’électricité. Or plus vous consommez de l’électricité, plus le câble se surchauffe. Et le résultat est fatal. »

L’eau de plus ravive le feu

L’autre erreur soulignée par notre expert est l’utilisation l’eau de pluie pour étreindre le feu, en cas de sinistre. « L’eau de pluie n’éteint pas un incendie. Parce que c’est de l’eau oxygénée. Et à cause de l’oxygène, l’eau de pluie a tendance à raviver le feu », explique notre expert.

A l’en croire les problèmes des marchés ivoiriens se résument en une triple problématique sécuritaire : l’absence de fluidité, pas de couloirs d’évacuation en cas d’incendie ; l’absence de sécurité avec la présence d’éléments pour intervenir dans la rapidité en cas d’incendies ; l’absence de présence sanitaire dont l’objectif est de prendre en charge le plus rapidement possible un usager qui pique une crise d’AVC, d’épilepsie ou tout autre crise pour être évacué… « En général il y a toujours un dispensaire de premiers soins. Mais aucun marché d’Abidjan n’en dispose… Les marchés à l’en croire sont surpeuplés et les autorités ne font rien pour les adapter à la croissance de la population.

Faut-il pour autant conclure que les commerçants doivent se résigner et attendre leur tour de malheur ? Notre spécialiste propose, pour mettre les marchés à l’abri du feu, de repartir sur de nouvelles bases avec de nouvelles conceptions de marchés. « On a fait construire Abidjan par des architecte alors qu’il fallait faire venir des urbanistes. Toutes les histoires d’inondations qu’on a en période de saison pluvieuse trouvent là leurs sources. La plupart des quartiers ont été construits avec la même faiblesse », explique le spécialiste. Une digression sur les inondations. Mais il espère que les autorités prennent à bras le corps la prévention de ces drames qui ruinent la vie des braves commerçantes et commerçants en Côte d’Ivoire.  

A Abobo, le maire Hamed Bakayoko a promis d’accompagner les commerçants sinistrés du 26 juin… pour leur réinstallation. « Nous allons, rapidement, voir comment, avec le service technique de la mairie, créer les conditions de leur réinstallation », promettait le ministre d’Etat, ministre de la Défense, sur les ruines du marché brulé de sa commune.  M. Bakayoko avait également consolé les sinistrés avec la somme de quatre millions de F CFA.

Ténin Bè Ousmane

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