En Côte d’Ivoire, le commerce en ligne est une opportunité pour beaucoup d’étudiants.

Publié le 3 mars, 2021

Étudiants, la plupart des jeunes se sentent responsables. Aussi, pour ne pas rester à la charge des parents, beaucoup imaginent des moyens de gagner de l’argent. Certains voient dans le commerce en ligne, une vraie opportunité.

« Je vends des vêtements pour hommes et pour femmes. La plus part de mes clients sont les fonctionnaires, les élèves, les étudiants et autres. Je propose ces articles via les réseaux sociaux », révèle Kossonou Ézéchiel. A 25 ans cet étudiant, qui s’est confié à VoixVoie De Femme, ce mercredi 24 février 2021 sur le campus de Cocody, se frotte bien les mains dans ce commerce.

« Je prends juste des photos de vêtements avec des personnes qui disposent de magasins de vêtements au « Black » ( marché situé non loin de la mosquée d’Adjamé) et à  »petit lomé » ( juste après la mosquée).  Je publie ensuite les images obtenues sur Facebook, WhatsApp et souvent sur Instagram », détaille Ezéchiel.

Comme lui, beaucoup d’étudiants pratiquent cette activité. Koffi Cécilia, Etudiante de 22 ans s’est spécialisée dans la vente des parfums et des sous-vêtements féminins. Elle fait des cours à distance. « Mes clients sont les étudiants et certains élèves. Pour avoir plus de clients je partage et je fais partager les images de mes marchandises par mes amis et connaissances », explique-t-elle.

Ce secteur d’activité demande que tu sois toujours en veille permanente, pour ne pas perdre ton client.

« Je reste toujours connecté. Une fois que j’ai un client. Je me rends chez le marchand qui a le vêtement demandé. Puis je donne une garantie au marchand. La garantie peut être payer un tiers du prix du vêtement ou simplement la confiance entre le vendeur et moi. Vu que j’ai pour habitude de prendre des marchandises avec lui. Il me donne ses marchandises avec confiance. Puis je vais livrer la commande. C’est après la livraison je reviens payer l’argent du marchand. Pour avoir un bénéfice, je vends toujours plus qu’au prix d’achat du produit. Mes clients sont un peu partout en Côte d’Ivoire. Si, le client est à Abidjan. Je fais une livraison à domicile. Et s’il est à l’intérieur du pays, je fais une expédition », s’est confié l’étudiant de 25 ans.

Chaque étudiant à son système de vente. Cécilia explique sa technique.

« J’ai mes marchandises à la maison. Lorsque j’ai une commande. Je ne cours pas dans tous les sens. Je ne fais que livrer la commande. Pour la livraison, je me déplace personnellement chez le client vu que mes clients sont uniquement à Abidjan. »

Les clients de ces étudiants e-commerçants sont souvent d’autres étudiants. Atchan Israël, est l’un de ces clients qui préfèrent acheter avec ses amis.

« Je n’aimais pas faire des achats en ligne. Mais un jour, en regardant des statuts sur WhatsApp d’une amie étudiante, j’ai été frappé par l’image d’une chemise. J’ai passé immédiatement une commande. Comme elle avait cours en semaine, j’ai pris rendez-vous. Quand elle m’a livré la marchandise, j’étais satisfait. Depuis lors, je suis devenu un fidèle client», témoigne cet étudiant de 24 ans.

Il n’y pas que les étudiants qui achètent les articles de leurs amis étudiants. Kouakou Solange, ménagère, 35 ans, est également l’une de leurs clientes. 

« J’aime les achats en ligne. C’est moins fatiguant et c’est moins cher. Lorsque je vois quelques choses qui me plait. Je commande et on livre à domicile. J’achète tout en ligne sans exception. Je suis toujours satisfaite de mes livraisons », se dit-elle convaincue.

Vendre en ligne pour ces jeunes est compatible avec leur statut d’étudiant. Pas de magasin, pas de stock de marchandise, pas « besoin » de faire de la prospection, une clientèle active.

« Je vends à n’importe quel moment même étant au campus. Quand je m’accorde avec un client sur un article, je fixe un rendez-vous avec lui et je fais ma livraison. Je m’en sors très bien avec ce commerce », se réjouit Ezéchiel.

Il y a un motif qui pousse les étudiants au commerce en ligne. Pour Kadio Aka Claude, président de l’Organisation des parents étudiants et élèves de Côte d’Ivoire (OPEECI), les étudiants sont obligés de faire ces activités parce que les parents ne les soutiennent pas suffisamment. « Quand un enfant devient étudiant, les parents pensent immédiatement que cet enfant peut s’assumer », regrette M. Claude Kadjo.

Pour lui, tout parent doit toujours intervenir pour son enfant jusqu’au terme de ses études. « L’étudiant étant confronté à tout type de problème financier. Il use de stratégie pour avoir un peu de moyen pour achever ses études ». « Nous encourageons cette pratique. Pourvu qu’il soit dans les normes », souligne M. Kadjo. 

Il achève ses dires en ces termes. « Le commerce pratiqué par les étudiants n’a pas d’influence, ni de conséquences sur leur étude. Car à l’Université, il y a des programmes. Et ces programmes sont suffisamment larges. Il y a des moments libres. C’est à ces moments libres que les étudiants font leur business. Ce n’est pas comme dans les lycées où les programmes sont à la baguette. Dans les grandes écoles également, ils ont un programme. En plus de cela il y a des plages horaires d’heures creuses. Et c’est forcément dans ces tranches creuses qu’il embrasse une petite carrière. Ils font des petites tâches pour s’assumer financièrement.»

Fofana Ben, professeur dans un collège d’Abidjan, ce commerce n’influence pas les études des étudiants. « C’est une bonne initiative de la part des étudiants.  Qui parle d’étudiant, parle d’une personne capable de développer un potentiel acquis. Et il faut souligner que ce sont des affaires que les étudiants apprennent à monter en s’entrainant à ces business qui peuvent devenir une activité principale », soutient cet enseignant. Pour lui, cette pratique de commerce en ligne n’est pas seulement pratiquée par les étudiants ivoiriens. « Aux États Unis ou dans les pays anglophones, ces pratiques sont courantes sur les campus ».

Pour le sociologue Karamoko Vasseko, cette volonté des étudiants de se prendre en charge est un signe de maturité. « Un étudiant est un être mature. Il peut donc se prendre en charge. De plus tous les étudiants n’ont pas le même statut socio-professionnel. Un étudiant quitte le village pour un milieu urbain. Les parents n’étant pas présents. Il est amené à se construire lui-même. Afin de pourvoir subvenir à ses besoins. C’est ce qui envoie cette idée du commerce en ligne. Un étudiant est une personne qui fait des études dans un domaine spécifique. Étudier ne veut pas dire ne rien faire en dehors des études. Étudier veut dire qu’on est lié à une activité intellectuelle et qu’on a des programmes à suivre. Cela n’explique pas qu’on ne peut rien fait de ses journées. Le commerce est une activité qui rapporte des revenus financiers. Donc un étudiant qui n’a pas de soutien financier familial est dans l’obligation de se chercher une source de revenus », explique le sociologue qui voit dans le commerce en ligne une belle opportunité pour ces jeunes.

Audrey Appie (stagiaire)

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